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Annales gratuites Bac 1ère STI : Monologue de l'épouse de Dandin

Le sujet  2009 - Bac 1ère STI - Français - Ecriture d'invention Imprimer le sujet
Avis du professeur :

Théâtre et argumentation autour des relations conjugales.
Le sujet est facile, et intéressant à condition de ne pas commettre d'anachronisme, en faisant du personnage féminin une femme du XXIe siècle.
LE SUJET


(14 points)
A son tour, l'épouse de George Dandin paraît seule sur la scène. Rédigez le monologue qu'elle prononce pour se présenter et expliquer son point de vue sur son mariage et sur son mari.



Texte A

George Dandin, riche paysan qui a épousé la noble Angélique, paraît seul sur scène.

Acte I, Scène I

George Dandin.

 1   Ah ! qu'une femme demoiselle(1) est une étrange affaire ! et que mon mariage est
     une leçon bien parlante à tous les paysans qui veulent s'élever au-dessus de leur
     condition, et s'allier, comme j'ai fait, à la maison d'un gentilhomme ! La noblesse,
     de soi(2), est bonne ; c'est une chose considérable, assurément : mais elle est
 5   accompagnée de tant de mauvaises circonstances, qu'il est très bon de ne s'y
     point frotter. Je suis devenu là-dessus savant à mes dépens, et connais le style
     des nobles, lorsqu'ils nous font, nous autres, entrer dans leur famille. L'alliance
     qu'ils font est petite avec nos personnes : c'est notre bien seul qu'ils épousent ; et
     j'aurais bien mieux fait, tout riche que je suis, de m'allier en bonne et franche
10  paysannerie, que de prendre une femme qui se tient au-dessus de moi, s'offense
     de porter mon nom, et pense qu'avec tout mon bien je n'ai pas assez acheté la
     qualité de son mari. George Dandin ! George Dandin ! vous avez fait une sottise,
     la plus grande du monde. Ma maison m'est effroyable maintenant, et je n'y rentre
     point sans y trouver quelque chagrin.

Molière, George Dandin ou Le Mari confondu, 1668.


(1) Femme demoiselle : jeune fille ou femme née de parents nobles.
(2) De soi : en soi, en elle-même. La noblesse en elle-même est bonne.



LE CORRIGÉ


I - L'ANALYSE ET LES DIFFICULTES DU SUJET

Sujet

Contraintes

A son tour

► situer la scène dans la pièce : acte I, scène 2

L’épouse de George Dandin paraît seule sur scène

► reprendre le prénom : Angélique, le rang social indiqué par le monologue précédent : noblesse ; motiver si possible l’entrée en scène.

Rédigez le monologue qu’elle prononce pour se présenter

► écrire un monologue, en s’inspirant des procédés d’énonciation dans le monologue de Dandin : je, nous, adresse à soi-même, adresse indirecte aux spectateurs
se présenter : prénom, rang social, situation conjugale.

Et expliquer son point de vue sur son mariage et son mari

► tenir compte des éléments dans le texte. A « expliquer son point de vue » : texte d’argumentation, qui part de l’expérience personnelle « son mariage et son mari »

Caractéristiques générales du texte attendu :

Genre littéraire : théâtre, comédie : visée comique et satirique.
Type de texte :
monologue de théâtre.
Enonciation :
Je, Nous.
Niveau de langue
 : courant et si possible soutenu.
Tonalité : comique, satirique ou pathétique (si l’on songe à une jeune femme victime d’abord de son père puis de son époux).


II - LES DIFFERENTS TYPES DE PLANS POSSIBLES

Par un plan qui suit la proposition de l’énoncé :
1. Présentation du personnage,
2. Réflexion sur le mariage,
3. Sentiment envers son époux.

Par un plan reprenant le mouvement du texte de Molière
1. Sentiments liés à l’expérience du mariage : insatisfaction (cf. texte A lignes 1-8) et déception ou regret (lignes 9-10),
2. Récriminations sur l’époux (texte A lignes 10-12),
3. Expression des sentiments et présentation du nom par l’apostrophe (ligne 11).

La fin du monologue ne doit pas être artificielle, et doit être motivée par l’annonce d’un nouveau personnage.

Nous choisirons de développer le plan suivant l’énoncé, plan qui laissera plus de liberté de création à l’élève. Nous n’hésitons pas à adopter un registre plutôt soutenu, mais on admettra bien entendu un registre de langue courant et correct.


III - LES PISTES DE REPONSES

1. Entrée en scène et présentation du personnage :

● Angélique surveille le départ de son époux, fait des commentaires sur ce qu’elle a entendu, entre en scène car elle attend un autre personnage à qui elle doit confier une lettre de plaintes à son père, à sa mère ou à un personnage confident.

Acte I, scène 2

Angélique, entrant par la droite, alors que Dandin est sorti par la gauche.

Quel étrange époux, mécontent à tout propos, cherchant querelle pour un rien… Ah mon père que votre Angélique a lieu de se plaindre de votre choix ! Cette lettre que je vous envoie par Nicole vous tiendra fort bien informé de ma détresse ... ; ce barbon refuse même que je vous voie !

● Angélique surveille l’arrivée de son amant => Dandin est déjà cocu. Le texte vise la satire du mari cocu, qui malgré toutes ses précautions n’a pu empêcher sa jeune et ravissante épouse de succomber aux séductions d’un jeune premier.

2. Construire le personnage féminin d’après les indices du texte A, pour qu’il manifeste ses sentiments sur le mariage.

Une jeune femme noble qui s’appelle Angélique, qui doit être insatisfaite de son mariage puisque Dandin se plaint de son attitude méprisante, orgueilleuse (« une femme qui se tient au-dessus de moi, s’offense de porter mon nom »). Une jeune femme qui attend de son mari plus qu’il ne lui donne (« pense qu’avec tout mon bien je n’ai pas assez acheté la qualité de son mari. »)

Origines de son insatisfaction :

Mariage forcé et imposé par le père de la jeune fille sous-entendu ligne 7. Il ne faudrait envisager le mariage que par amour, par penchants mutuels. Registre satirique ou pathétique.

Angélique : Savais-je qu’en acceptant humblement le choix de mon père, je perdais ainsi ma vie ? Un mari vous asservit dès les premiers jours à ses volontés et, pire qu’un père, il impose sa tyrannie. (Singeant son époux) Madame, il faudra vous lever tôt pour veiller aux domestiques et à leurs tâches ; vous prendrez soin de la tenue de mon linge, de la qualité des repas que l’on me servira dans la grande salle. Je ne saurais manger ailleurs. Et peu importe mon sommeil, peu importe mon linge et peu importent mes goûts : je mangerais volontiers ce que l’on sert à mon digne époux !

Angélique : Que le mariage est bien source de chagrins… Quelle illusion que le mariage qui libère de la tyrannie d’un père ! Quelle amère désillusion qu’un mariage imposé où l’amour est banni ! Que les jeunes filles sont à plaindre : c’est comme si elles n’avaient pas de cœur, comme si ce cœur n’avait pas même à exister.

Du prétendant au mari ; attitude de gentilhomme de Dandin avant le mariage qui s’avère une simple stratégie de séduction = déception de la jeune femme face au caractère frustre de Dandin.

Angélique : Que les hommes sont trompeurs ! Qu’ils connaissent à merveille l’art de séduire les jeunes filles et celui d’asservir leur épouse ! Qui aurait pu croire que le jeune homme si charmant qui vous faisait assidûment la cour, au langage fleuri et précieux, pourrait se métamorphoser en un odieux personnage autoritaire et peu soucieux du bien-être de celle qu’il adorait avant le mariage…

Mariage par dépit amoureux et absence de satisfaction dans la relation conjugale : découverte de l’absence de liberté dans le mariage.

Angélique : Pourquoi Dorante me délaissiez-vous, m’abandonniez-vous à cet homme chagrin que mon père vous préférait ? Pourquoi ne pas résister à ses réticences ? J'ai cru que vous ne m’aimiez plus, que vos soupirs n’étaient que simagrées, j’ai même cru que vous ne m’aviez jamais aimée quand je vous vis auprès de la belle Hortense. Désespérée, je trouvais refuge dans le mariage ; il me semblait y reconquérir mon amour-propre et peut-être votre propre amour… Mais vous n'avez fait aucune objection à ce mariage, vous avez même eu l’audace même d’y applaudir… Mes malheurs commençaient à peine. J’ignorais encore ce qu’est être femme ! Être femme, c’est être l’esclave, être femme, c’est contenter toujours d’un oui et ne jamais pouvoir dire non ; être femme, c’est être la moitié de la moitié : toujours attendre le bon plaisir du maître, toujours satisfaire l’époux avant de satisfaire ses propres besoins. Être femme, c’est oublier que l’on a un cœur pour aimer, et une tête pour penser.

3. Sentiments sur son époux :

Méprisante et orgueilleuse, telle que la voit Dandin ou blessure d’amour-propre de la jeune femme peu habituée aux manières ou aux expressions de son riche « paysan » : remarques sur son manque d’éducation, de vocabulaire, d’élégance vestimentaire, et de maintien en société ; remarques sur ses sentiments médiocres, son appétit sexuel.

Angélique : Le mari est plus qu’une étrange affaire, quand il se nomme George Dandin ! C’est une affaire renversante ! Monsieur me prend pour une potiche. Je ne suis bonne épouse que si je m’habille comme il se doit aux réceptions que notre bourgeois donne aux commensaux du même acabit !

Attentes d’Angélique : un homme courtois et précieux (cf. Les Précieuses ridicules) ou un homme policé, attentif à ses désirs, à ses attentes : (L’Ecole des femmes, ou Les femmes savantes),

Angélique : Que cet époux me répugne : à table aucune conversation, que celle de ses blés et de ses moutons ! Son argent tient la seconde place dans son cœur et c’est seulement à ces sujets qu’il s’émeut. La solitude de sa femme à qui il n’offre aucune joie, aucun agrément de cours de musique ou de danse il ne la voit même pas. Que peut-il comprendre de mon ennui ? Que ne peut-il partager mes lectures ? Connaît-il seulement. L’Ecole des femmes ou Les Femmes savantes ? A-t-il seulement à l’esprit qu’une femme puisse penser par elle-même ?


IV - LES FAUSSES PISTES


Oublier dans le fil de la rédaction le fait qu’il s’agisse d’un monologue et faire intervenir un personnage.
Des réflexions anachroniques sur le mariage. Songer aux conditions du mariage au XVIIe siècle.


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