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Annales gratuites Bac L : La figure maternelle

Le sujet  2008 - Bac L - Littérature - Question Imprimer le sujet
Avis du professeur :

La question porte sur une série de personnages : les figures maternelles. Elles sont nombreuses et diverses dans le roman ce qui permet de construire une réponse riche et nuancée.
Le sujet est très classique et permet notamment de faire état des interprétations qui peuvent être faites des oeuvres au programme. Il vous donne également la possibilité d'exprimer votre point de vue.

LE SUJET

Comment percevez-vous la figure maternelle dans les Contes de Charles Perrault ?
(8 points)

LE CORRIGÉ

I - L'ANALYSE ET LES DIFFICULTES DU SUJET

Sujet

Contraintes

Comment percevez-vous...

votre réponse doit présenter, implicitement ou explicitement, une interprétation personnelle des oeuvres

...la figure maternelle...

la question porte sur une série de personnages. Votre réponse doit proposer un catalogue raisonné et critique des personnages concernés.

...dans les Contes de Perrault.

Attention la question ne concerne pas les illustrations de Doré puisqu'il n'y est pas fait référence. Mais rien n'interdit d'y faire allusion.

 

II - LES DIFFERENTS TYPES DE PLANS POSSIBLES

Par un plan thématique : vous pouvez construire votre réponse à partir des différents types de mères pour montrer la diversité de cette figure au sein de l'oeuvre. Dans ce cas il ne faut pas se limiter à une galerie de portraits strictement descriptifs mais commenter dans chaque paragraphe analytique les raisons qui justifient leur présence dans les contes.

1) les mauvaises mères : l'ogresse, la marâtre
2) les bonnes mères : mère décédée, fée-marraine (mais il y a peu d'exemples dans l'oeuvre)
3) un personnage complexe et ambigu

Par un plan analytique c’est celui que nous proposons : vous pouvez en fait partir des représentations habituelles et attendues de la figure maternelle puis montrer comment Perrault en propose des images diverses, contradictoires, voire choquantes et enfin expliquer ces écarts.

1) une figure incontournable
2) des personnages ambigus et inquiétants
3) un ouvrage didactique qui interroge

 

III - LES PISTES DE REPONSES

Le plan choisi est de type analytique. Il consiste à poser d'abord la permanence de la figure maternelle dans les Contes de Perrault pour exhiber sa rareté. Bien souvent, la mère est absente ou défaillante. Se substitue à elle une fée-marraine ou une belle-mère. Perrault met donc en scène des personnages inquiétants. Sans doute cherche-t-il à travers cette critique à mettre en garde ses lectrices, mères pour la plupart, sur les responsabilités qui leur incombent.

PREMIÈRE PARTIE

Les figures maternelles semblent abonder dans le recueil de Perrault. Elles sont le plus souvent mentionnées au début du récit puisqu'elles donnent naissance au héros et veillent à ses intérêts (choix des marraines, douceur héréditaire de Cendrillon, femme de l'ogre dans Le Petit Poucet qui essaie de cacher les enfants perdus à son mari). Mais elles sont en réalité peu nombreuses si l'on considère strictement celles qui atteignent l'idéal d'amour et de protection que le lecteur associe spontanément à cette figure. La Bûcheronne du Petit Poucet fait figure d'exception lorsqu'elle pleure sur la nécessité d'abandonner ses enfants. Le plus souvent, la place de mère est occupée dans les contes soit par une marraine, figure de substitution qui intervient pour protéger sa filleule (Peaud'âne, La Belle au bois dormant, Cendrillon, Riquet à la Houppe), soit par une belle-mère qui asservit sa belle-fille aux basses besognes (Cendrillon).

Les figures maternelles dans le recueil sont donc le plus souvent défaillantes et inquiétantes.

 

DEUXIÈME PARTIE

Certaines mères dans le recueil ne remplissent pas leur rôle : l'éducation des enfants est souvent défaillante. Le Petit Chaperon rouge part seule, dans la forêt, sans que sa mère ou sa mère-grand ne la mettent en garde contre les dangers. Ces dernières méritent alors le qualificatif de "folle" dont use Perrault pour la présenter au seuil de ce conte. La mère de la future épouse de la Barbe bleue laisse sa cadette épouser un homme douteux, au mépris des règles sociales (c'est l'aînée qui devrait se marier la première).

Elles sont bien souvent à l'origine des malheurs qui frappent leur progéniture : la mère de la princesse dans Peau d'âne voue sa fille à un mariage incestueux ; dans Les Fées, la mère "désagréable, orgueilleuse et brutale" exploite sa cadette, préférant l'aînée parce qu'elle lui ressemble en tout point. Cette injustice est partiellement réparée par la ou les fées qui apparaissent à la fontaine.

La psychanalyse n'a pas manqué de commenter ces personnages monstrueux : la mère du prince dans La Belle au bois dormant, "de race ogresse", souhaite manger sa belle-fille et ses petits enfants pour "se satisfaire" (c'est ce qu'elle enseigne à son fils) mais aussi sans doute pour s'approprier leurs qualités (beauté, jeunesse) et garder son fils pour elle seule. Perverses, dangereuses, effrayantes, tels sont les termes qui qualifient pour un lecteur attentif les figures maternelles dans les Contes de Perrault.

Les figures maternelles dans le recueil semblent donc des repoussoirs proposés au lecteur à des fins didactiques.

 

TROISIÈME PARTIE

Un tel constat ne peut que susciter l'interrogation. Comment expliquer une telle noirceur et sa permanence ? Il faut songer au lectorat de Perrault. Essentiellement féminin, il pourrait être choqué par une telle peinture. Mais ces figures appartiennent au genre du conte. Elles sont donc volontiers caricaturales. Surtout, elles relèvent grandement de la dimension didactique du projet de l'auteur : instruire est un des maître-mots de Perrault, et sans doute veille t-il à définir en creux les responsabilités des mères : protection, amour, éducation. C'est parce que les personnages maternels de ces contes sont privés de ces principes qu'ils vouent les héros à un possible malheur.

CONCLUSION

Les figures maternelles dans le recueil de Perrault s'écartent grandement, pour le lecteur contemporain, du modèle attendu. Elles témoignent en cela de la prégnance au XVIIe siècle des débats sur l'éducation des enfants. Peut-être peut-on même y lire une forme de psychanalyse avant la lettre du couple mère enfant. Force est de constater que Doré n'a guère retenu ces figures pour illustrer à la fin du XIXe les oeuvres de Perrault. Faut-il y voir une gêne à l'égard de ces êtres inquiétants ? De même il n'est guère étonnant que les auteurs qui ont repris Perrault aient modifié certains de ces portraits : ainsi les frères Grimm font de la mère de leur Petit Chaperon rouge une femme soucieuse d'avertir sa fille des dangers si elle parle aux inconnus.

IV - LES FAUSSES PISTES

 

Il ne fallait pas se limiter aux mères et songer aussi au sens générique de "figure" qui inclut les belles-mères, les fées marraines et éventuellement la grand-mère.

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