Le sujet 2006 - Brevet Série Collège - Français - Questions |
Avis du professeur :
Les questions portent sur un texte relativement complexe, car
il décrit une réalité que vous ne connaissez pas, heureusement, celle des
enfants qui vivent dans l'absolue misère des bidonvilles du tiers-monde. |
Toni Zambudio, journaliste madrilène qui a grandi au
Mexique, se rend à Ciudad
Juarez, ville frontalière mexicaine, pour une enquête.
Il découvre alors les
"colonias", bidonvilles qui fleurissent en
périphérie des grandes villes.
Toni conduisait lentement. Après avoir dépassé le marché
central, il avait
emprunté l'avenida 16 de Septiembre(1) qui s'enfonçait
comme un coup de fusil vers
les faubourgs, à l'ouest de la ville.
Bientôt, il n'y avait plus eu que des maisons basses,
des marchands de pièces
5 de voitures d'occasion, de jantes dépareillées et des
réparateurs de pneus, de pots
d'échappement. Il avait longé des taquerias(2) où l'on
vendait du menudo(3), avait
cherché en vain à se rappeler à quoi ce plat pouvait
bien ressembler, et, pour finir, il
avait tourné dans la calle(4) Chiapas qui s'élevait en
direction d'un belvédère(5)
pouilleux. Le bitume, d'abord truffé de nids-de-poule,
avait bientôt disparu pour faire
10 face à une piste défoncée.
(...)
Il s'était bientôt retrouvé entouré de cabanes de bric
et de broc. Les
constructions de parpaings bruts et de palettes de
déchargement d'occasion
s'étalaient sur la colline en un paysage de désolation.
Du linge rapiécé séchait sur
15 des fils. Les eaux usées des habitations ruisselaient
en cascades sur les terrasses
étayées par des murettes de pneus lisses empilés.
Vers les hauteurs, les masures avaient pris un aspect
plus primitif encore,
uniquement construites avec des cartons d'emballage et
du papier goudronné en
guise de toiture. Des milliers de sacs plastique
jonchaient le sol, s'accrochaient aux
20 buissons de mesquite(6) rabougris comme des pendus. La
fumée des feux de camp
montait vers le ciel et le soleil descendait déjà sur
El Paso et le Texas. A dix
kilomètres au nord-ouest s'allumaient les premières
lumières des Etats-Unis. Des
gamins sales et nus jouaient, assis dans la boue d'une
flaque d'eau savonneuse.
Zambudio s'était arrêté pour leur demander où vivait la
famille Cruz. Le cadavre
25 gonflé d'un chien gisait sur le bas-côté.
Aussi loin que portait le regard, le bidonville avait
grignoté l'espace.
Le journaliste avait essayé d'imaginer ces territoires
immenses, vierges
encore, peuplés uniquement d'Apaches et de Tarahumaras(7).
Une éternité s'était
écoulée, depuis.
30 Ne restait que l'odeur un peu âcre d'égout en plein
air, mêlée au fumet des
frijoles(8) qui cuisaient au fond des cabanes. Une odeur
de misère.
Patrick Bard, La Frontière, Le Seuil, 2002
(1) avenida 16 de Septiembre :
Avenue du 16 septembre
(2) taquerias : espagnol (Mexique) : petites boutiques où l'on vend des tacos
(galettes de maïs garnies de viande)
(3) menudo : abats, viande de basse qualité
(4) calle : rue
(5) belvédère : endroit depuis lequel on jouit d'une belle vue
(6) mesquite : arbuste typique du Mexique
(7) Tarahumaras : peuple indien d'Amérique
(8) frijoles : haricots mexicains
QUESTIONS (15 points)
I - La découverte du bidonville (5 points)
1. Lignes 12 à 25 : "Les constructions de
parpaings bruts... d'un chien gisait sur le bas-côté."
Quel est le temps dominant dans ce passage ? Justifiez son emploi. (1 point)
2.
a. Relevez dans les lignes 4 à 25 les différents synonymes du mot "maisons"
(ligne 4), ainsi que les termes désignant les matériaux utilisés pour la
construction des maisons. (1 point)
b. Quelle évolution constatez-vous dans cette description du bidonville
? (1 point)
3. Décomposez le mot "bidonville" (l. 26) et expliquez-le. (1 point)
4. En conclusion, montrez en quelques lignes que la découverte du bidonville par le journaliste se fait de manière progressive. (1 point)
II - L'homme et la nature (4 points)
5. Relevez les termes appartenant au champ lexical de la nature à partir de la ligne 12. (0,5 point)
6. Dites en quelques lignes quelle place occupe la nature dans le bidonville. (1,5 point)
7. "le bidonville avait grignoté l'espace"
(I. 26)
Quelle figure de style est utilisée dans ce passage ? Quel est son effet ? (1 point)
8. Lignes 27 à 29 ("Le journaliste avait essayé
d'imaginer...depuis.")
Reliez les deux phrases simples par une conjonction de coordination appropriée.
Pourquoi l'auteur n'a-t-il pas choisi cette solution ? (1 point)
III - Une dénonciation de la misère (6 points)
9.
a. Citez l'unique phrase du texte où est mentionnée une présence humaine
dans le bidonville. Pourquoi est-elle particulièrement évocatrice ? (1 point)
b. "Le cadavre gonflé d'un chien gisait sur le bas-côté." (lignes
24-25)
Quel effet cette évocation produit-elle sur le lecteur ? Justifiez votre
réponse. (1 point)
c. Trouvez dans le texte deux comparaisons qui évoquent aussi la mort
violente. (0,5 point)
10. "La fumée des feux de camp montait vers le
ciel et le soleil descendait déjà sur El Paso et le Texas." (lignes 20-21)
Remplacez "et" par une conjonction de subordination dont vous
préciserez la valeur. (1 point)
11. "A dix kilomètres au nord-ouest s'allumaient
les premières lumières des Etats-Unis." (lignes 21-22)
Comment le sujet du verbe est-il mis en valeur ? Dans quelle intention ? (0,5 point)
12. Quelle est la particularité syntaxique de la phrase finale ? Quel effet produit-elle ? (1 point)
13. En conclusion, montrez en quelques lignes comment le texte dénonce la misère. (1 point)
REECRITURE (4 points)
Lignes 6 à 9 : "II avait longé des taquerias... en
direction d'un belvédère pouilleux." Remplacez le plus-que-parfait et
l'imparfait par le passé composé et le présent.
IMPORTANT !
Pour plus de clarté, nous répétons les questions, telles qu’elles figuraient sur votre sujet, mais vous n’étiez pas obligé de le faire. Il était souhaitable de développer et d’étoffer les réponses comme nous l’avons fait, pour des raisons de présentation et de lisibilité. Cependant les élèves n’ayant fourni que les réponses en lettres rouges auront l’intégralité des points indiqués.
QUESTIONS (16 points)
I - LA DECOUVERTE DU BIDONVILLE (5 points)
1. Lignes 12 à 25 : "Les constructions de
parpaings bruts... d'un chien gisait sur le bas-côté." :
Quel est le temps dominant dans ce passage ? Justifiez son emploi. (1
point)
● C'est l'imparfait qui domine le passage :
"s'étalaient", "séchait", "ruisselaient". (0,5 point)
● L'imparfait
est justifié par la description, la
permanence et la durée de l'état dans lequel se trouvent ces choses. (0,5 point)
2.
a. Relevez dans les lignes 4 à 25 les différents synonymes
du mot "maisons" (ligne 4), ainsi
que les termes désignant les matériaux
utilisés pour la construction des maisons. (1 point)
"Cabanes de bric et de broc", "Les
constructions de parpaings bruts et de palettes de déchargement d'occasion",
"des murettes de pneus lisses empilés", "habitations", "masures",
"des cartons d'emballage et du papier goudronné en
guise de toiture".
b. Quelle évolution constatez-vous dans cette
description du bidonville ?
Plus le narrateur avance dans la
description, plus il accentue le caractère misérable
de ses constructions et des gens qui y vivent.
3. Décomposez le mot "bidonville"
(l. 26) et expliquez-le. (1 point)
Le mot "bidonville" est composé de
deux éléments "ville", "bidon" (0,5 point), comme s'il s'agissait d'une ville
faite de bidons, c'est-à-dire d'objets hors d'usage, disparates et qui ne sont
pas destinés à la construction. (0,5 point)
4. En conclusion, montrez en quelques lignes que la
découverte du bidonville par le journaliste se fait de manière progressive. (1
point)
● Il a d'abord une vue générale sur "maisons
basses", les "marchands de pièces de voitures", "les
taquerías",
● Il observe de plus près la route "le bitume,
d'abord truffé de nids-de-poule" laisse place à une simple "piste".
● Il se trouve en plein bidonville, "entouré de
cabanes".
● Il pose son regard sur les détails, les matériaux
de construction, le "linge", qui sèche, les "eaux usées".
● Il progresse dans les quartiers les plus
misérables "les masures avaient pris un aspect..."
● Il découvre
ses habitants à travers des "gamins sales et nus", puis "le
cadavre d'un chien".
● Il conclut sur ce qui émane de toute cela : "une odeur de misère".
II - L'HOMME ET LA NATURE (4 points)
5. Relevez les
termes appartenant au champ lexical de la nature à partir de la ligne 12. (0.5
point)
A part des termes généraux comme : "paysage", "eaux",
"cascades", le seul élément concret qui rappelle la
nature, ce sont les "buissons de mesquite rabougris". (0.5
point)
6. Dites en
quelques lignes quelle place occupe la nature dans le bidonville.
Comme l'auteur le dit vers la fin "le bidonville avait grignoté
l'espace" où s'étendaient "ces territoires immenses, vierges." La nature a donc été détruite et il n'en reste
presque plus rien.
7. "le bidonville avait grignoté l'espace"
(I. 26)
Quelle figure de style est utilisée dans ce passage ? Quel est son effet ? (1
point)
Il s'agit d'une "personnification".
Car le bidonville est comparé à un rongeur qui dévore petit à petit la nature.
Cela a un effet expressif et c'est une image
très parlante. On sent aussi que c'est un processus irrémédiable, car ce qui a
été "grignoté" est définitivement perdu.
8. Lignes 27 à 29 ("Le journaliste avait essayé
d'imaginer...depuis.")
Reliez les deux phrases simples par une conjonction de coordination appropriée.
Pourquoi l'auteur n'a-t-il pas choisi cette solution ? (1 point)
"Le journaliste avait essayé d'imaginer ces territoires immenses, vierges
encore, peuplés uniquement d'Apaches et de Tarahumaras. Or
(ou bien : "mais")
Une éternité s'était écoulée.
L'écrivain emploie volontairement des phrases simples pour éviter de décrire une situation dans une optique cause/conséquence., mais
cette écriture rend le sous-entendu plus intense.
III - UNE DENONCIATION DE LA MISERE (6 points)
9.
a. Citez l'unique phrase du texte où est mentionnée une présence humaine
dans le bidonville. Pourquoi est-elle particulièrement évocatrice ? (1 point)
"des gamins sales et nus" jouaient, assis
dans la boue d'une flaque d'eau savonneuse."
Elle montre le dénuement
extrême de ces
petits enfants, qui jouent dans la boue comme de petits cochons.
b. "Le cadavre gonflé d'un chien gisait sur le
bas-côté." (lignes 24-25)
Quel effet cette évocation produit-elle sur le lecteur ? Justifiez votre
réponse. (1 point)
Elle produit une sensation d'indignation, de
révolte et en même temps de dégoût, d'écoeurement,
car elle montre combien la vie a peu de prix.
c. Trouvez dans le texte deux comparaisons qui
évoquent aussi la mort violente. (0,5 point)
"l'avenida 16 de septiembre qui s'enfonçait comme
un coup de fusil". (0.25 point)
"Des milliers de sacs [...] comme des
pendus". (0.25 point)
10. "La fumée des feux de camp montait vers le
ciel et le soleil descendait déjà sur El Paso et le Texas." (lignes 20-21)
Remplacez "et" par une conjonction de subordination dont vous
préciserez la valeur. (1 point)
"La fumée des feux de camp montait vers le ciel tandis
que (ou bien : alors que, pendant que, en même temps que, etc.) le
soleil descendait déjà sur El Paso et le Texas." (0.5 point)
Cette conjonction souligne la concomitance des
deux mouvements (ou : la simultanéité, le fait que les deux actions aient lieu en même temps.)
11. "A dix kilomètres au nord-ouest s'allumaient
les premières lumières des Etats-Unis." (I. 21-22)
Comment le sujet du verbe est-il mis en valeur ? Dans quelle intention ? (0,5
point)
Le sujet " les premières lumières des Etats-Unis" est placé après le verbe. Cela crée un
effet d'attente, de suspens, de surprise on se demande ce qu'il y a
"à dix kilomètres" avant de découvrir qu'il s'agit des
"Etats-Unis" dont la lumière souligne la richesse. À quelques
kilomètres près se côtoient presque la pauvreté absolue et une richesse
démesurée. Le contraste en est d'autant plus éclatant.
12. Quelle est la particularité syntaxique de la
phrase finale ? Quel effet produit-elle ? (1 point)
Il s'agit d'une phrase nominale, qui présente un
constat sans appel : le texte se résume
à"Une odeur de misère".
13. En conclusion, montrez en quelques lignes comment
le texte dénonce la misère. (1 point)
Le texte dénonce la misère à tout moment, aussi bien à travers l'évocation de faits concrets : l'habitat, la
pauvreté, etc. que par la progression dans la
description qui plonge peu à peu le lecteur dans cet univers, pour susciter une réaction de révolte.
REECRITURE (4 points)
Lignes 6 à 9 : "II avait longé des taquerías... en direction d'un belvédère pouilleux." Remplacez le plus-que-parfait et l'imparfait par le passé composé et le présent.
"II a longé des taquerías,
où l'on vend du menudo, a cherché en
vain à se rappeler à quoi ce plat peut bien
ressembler, et, pour finir, il a tourné dans
la calle Chiapas qui s'élève en direction d'un
belvédère pouilleux."