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Annales gratuites Bac Pro Secteur Industriel : L'Allemagne, de 1850 à nos jours

Le sujet  2004 - Bac Pro Secteur Industriel - Histoire - Etude de documents Imprimer le sujet
LE SUJET

DOCUMENTS

Document 1 : Le territoire allemand de 1850 à 1919

Document 2 : Une carte extraite d'un atlas pangermaniste allemand (1893)

LANGUES ET PEUPLES D'EUROPE, d'après un atlas pangermaniste allemand (1)

1) Pangermaniste : courant de pensée politique allemand de la fin du XIXè siècle, voulant rassembler tous ceux qu'il considère comme des Allemands dans un seul Etat.

Document 3 : La conception de la nation et les projets territoriaux des nazis (1920)

PROGRAMME DU NSDAP(1), MUNICH, 24 FEVRIER 1920 (EXTRAITS)
"1. Nous demandons la constitution d'une grande Allemagne, réunissant tous les Allemands sur la base du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.

2. Nous demandons l'égalité des droits du peuple allemand au regard des autres nations, l'abrogation du Traité de Versailles.

3. Nous demandons de la terre et des colonies pour nourrir notre peuple et résorber la surpopulation.

4. Seuls les citoyens bénéficient des droits civiques. Pour être citoyen, il faut être de sang allemand, la confession importe peu. Aucun juif ne peut donc être citoyen. [...]

5. Le droit de fixer la direction et les lois de l'État est réservé aux seuls citoyens. Nous demandons que toute fonction publique, quelle qu'en soit la nature, ne puisse être tenue par des non-citoyens. [...]

7. Nous demandons que l'Etat s'engage à procurer à tous les citoyens des moyens d'existence. Si ce pays ne peut nourrir toute la population, les non-citoyens devront être expulsés du Reich".

Cité dans Walter HOFFER, Le National-socialisme par les textes, PLON, 1963

1) NSDAP : le parti national-socialiste ouvrier allemand (parti nazi)

Document 4 : Extrait du communiqué final de la Conférence de Yalta (11/02/1945)

"(...)

II - Occupation et contrôle de l'Allemagne

Nous nous sommes mis d'accord sur la politique commune et les plans communs à adopter pour assurer l'exécution des termes de la capitulation inconditionnelle que nous imposerons à l'Allemagne nazie, après que la résistance armée allemande aura été définitivement écrasée. (...)

Les plans adoptés prévoient que chacune des trois puissances occupera avec ses forces armées une zone séparée en Allemagne. Il a été, en outre, convenu que la France serait invitée par les trois puissances, si elle le désire, à occuper également une zone et à faire partie de la commission de contrôle comme quatrième membre de cette commission. (...)

Il n'est pas dans notre intention d'anéantir le peuple allemand, mais les Allemands ne pourront espérer une existence convenable et une place dans le Conseil des nations unies qu'après l'extirpation du national-socialisme et du militarisme.

VI - Pologne

(...)

Nous réaffirmons notre désir commun de voir s'édifier une Pologne forte, libre, indépendante et démocratique. (...)

Les chefs des trois gouvernements estiment que la frontière orientale de la Pologne à l'est devra suivre la ligne Curzon(1). (...) Ils reconnaissent que la Pologne devra obtenir des accroissements sensibles de territoires au Nord et à l'Ouest. (...) "

Http://hypo.ge-dip.etat-ge.ch/www/cliotexte/html/yalta.1945.html

1) Ligne Curzon : Ligne tracée après la Première guerre mondiale par un diplomate britannique. Avantageuse pour les Soviétiques, elle correspond à l'actuelle frontière orientale de la Pologne.

Document 5 : Les territoires en Europe centrale en 2000

Le 22 septembre 2000, un colloque est prévu à l'Université de Montréal (Canada) pour étudier le bilan et des perspectives de la réunification allemande. Le texte suivant est diffusé peu avant pour fixer les enjeux de cette réflexion historique.

"Bilan et perspectives de la réunification allemande"
Dix ans après la chute du mur, les pires appréhensions ne se sont pas produites

Les zones de conflits frontaliers potentiels, apparaissent plutôt stables dix ans après la réunification allemande, explique Laurent McFalls, organisateur du colloque sur les relations internationales de la réunification allemande.

La réunification de l'Allemagne a déjà dix ans. Pour faire le point sur les attentes et les craintes qu'a suscitées cet événement majeur de la fin du siècle dernier, le Centre canadien d'études allemandes et européennes [...] organise une table ronde qui réunira plusieurs experts de la question le 22 septembre.

Aux yeux de M. McFalls [organisateur du colloque], la situation potentiellement explosive il y a dix ans apparaît particulièrement calme et stable aujourd'hui; les pires appréhensions ne se sont pas produites. En 1990, plusieurs conflits frontaliers étaient à craindre. Du côté de la Pologne, par exemple, il n'était pas assuré que l'Allemagne allait reconnaître la frontière de 1945 alors que des territoires lui appartenant avaient été attribués à la Pologne. Aujourd'hui, la ville frontalière de Francfort-sur-l'Oder apparaît comme un exemple de coexistence pacifique. Du côté de la frontière tchèque, certains ont craint un mouvement de revanche de la part des réfugiés allemands expropriés et expulsés des territoires frontaliers tchèques après la guerre(1). Ce différend n'est pas encore réglé et les groupes allemands de droite exploitent le litige à des fins électorales.

Israël était lui aussi inquiet des répercussions de la réunification sur les Juifs allemands. Alors qu'on craignait une dérive nationaliste, l'Allemagne a reconnu l'Etat d'Israël ainsi que sa responsabilité dans l'holocauste(2). [...]

Si les voisins de l'Allemagne ont craint que l'importance de ses investissements économiques sur leurs territoires entraîne une forme de colonialisme, le professeur McFalls est d'avis que l'intégration économique s'avère positive pour des pays tels que la Pologne, la Hongrie et la République tchèque. "Tant que ça ira bien en Allemagne, ça ira bien dans ces pays", croit-il.

Daniel Baril, in www.forum.unmontreal.ca. 18 septembre 2000

1) En 1945, plusieurs millions d'Allemands ont été expulsés des territoires de l'Europe centrale et orientale annexés par l'Union soviétique et la Pologne ou recouvrés par la Tchécoslovaquie ou la Roumanie. Parmi eux, les Sudètes, Allemands des régions frontières de la Tchécoslovaquie dont l'agitation nationaliste avait servi de prétexte pour envahir le pays en 1938-1939.
2) Holocauste : nom par lequel on désigne, en Amérique du Nord, le génocide des Juifs par les nazis.

QUESTIONS

Question 1 (document 1)
Quelles sont les modifications intervenues dans l'organisation du territoire allemand entre 1850 et 1871 ?

Question 2 (document 2)
Quelles conceptions de la nation et du territoire apparaissent dans ce document ?

Question 3 (documents 2 et 3)
D'après le texte, quelles sont les intentions territoriales des nazis en 1920 ?
Quelle est leur conception de la nation ?
Quelle comparaison établir avec les conceptions des pangermanistes ? (document 2) ?

Question 4 (documents 4 et 5)
Quel est le sort de l'Allemagne en 1945 ?

Question 5 (document 5)
Quels sont les principaux événements évoqués par ce document ?
Quels sont les changements territoriaux qui se sont produits après 1989 ?

Question 6 (documents 2, 3 et 5)
Comment expliquer le sous-titre de l'auteur du document 5 : "Dix ans après la chute du mur, les pires appréhensions ne se sont pas produites" ?

Question 7 synthèse
A l'aide des documents, des réponses aux questions et de vos connaissances, rédigez une synthèse d'une vingtaine de lignes sur le sujet suivant : "Territoire et nation en Allemagne, de 1850 à nos jours".

LE CORRIGÉ

I - PRESENTATION DU SUJET

Le sujet proposé embrasse une vaste chronologie de 1850 à nos jours, soit une durée d'un siècle et demi.
Il porte sur les relations entre territoire et nation en Allemagne : pas question donc de séparer les deux concepts au moment de la rédaction de la synthèse.
Les documents sont là pour le rappeler : à différentes époques depuis le milieu du XIXème siècle, la conception de la nation allemande, l'idée que les Allemands ou que certains Allemands au pouvoir ont d'eux-mêmes influe très largement sur la construction ou les modifications du territoire allemand, de même que sur les revendications territoriales de l'Allemagne.
Les documents balisent la chronologie du sujet et chacun a son intérêt propre :
- Le document 1 retrace le chemin de l'unité allemande.
- Le document 2 indique (pas très clairement) le lien entre la conception pangermaniste de la nation allemande et sa volonté d'agrandir le territoire allemand
- Le document 3 met en relation la conception raciale de la nation développée par les nazis et leurs projets territoriaux agressifs.
- Le document 4 présente les résultats de la politique d'expansion nazie : une défaite à l'issue de la 2ème Guerre mondiale, avec les conséquences territoriales que cela suppose
- Le document 5 insiste sur le bilan de la réunification de 1990 et les litiges territoriaux qu'elle a pu susciter, ou qui avaient été "gelés" pendant les 40 dernières années de séparation de la nation allemande en 2 Etats, RFA et RDA, durant la guerre froide.

II - LES CONNAISSANCES ESSENTIELLES

Question 1
En 1850, il n'existe pas à proprement parler de "territoire allemand".
C'est l'éclatement qui prévaut comme au temps du Saint-Empire romain germanique : il existe quantité d'Etats, notamment des duchés comme celui de Bade ou des royaumes comme ceux de Prusse, de Bavière ou de Nurtemberg.
En 1871, au contraire l'Allemagne a réalisé à partir de la Prusse et grâce à l'œuvre de Bismarck son unité : un empire allemand est proclamé dans la galerie des glaces du château de Versailles après la victoire face à l'empire de Napoléon III.

Question 2
Ce document est une carte extraite d'un atlas pangermaniste. Il traduit les conceptions de la nation et du territoire de ce courant de pensée politique allemand de la fin du XIXème voulant rassembler tous ceux qu'il considère comme des Allemands dans un seul Etat.
Les auteurs de la carte indiquent les limites nécessaires de l'empire allemand selon eux et se prononcent pour son extension, notamment parce que certains peuples de langue allemande ne sont pas pour l'heure inclus dans le territoire allemand (certains sujets de l'empire d'Autriche-Hongrie). Pour ces auteurs, la nation allemande est donc formée de ceux qui partagent une langue commune mais sans doute aussi un vécu, une histoire, une culture communs, issus du Saint-Empire romain germanique : en effet, les frontières proposées "débordent" sur certains peuples slaves ou magyars, à l'est et au sud.

Question 3
Les intentions territoriales des nazis en 1920 sont claires : ils réclament "de la terre et des colonies pour nourrir notre peuple et résorber la surpopulation " (3ème point). Le programme du NSDAP a des visées expansionnistes et on devine ici la théorie de "l'espace vital" (lebensraum) nécessaire à la nation allemande pour se développer en direction de l'est, que Hitler formulera clairement dans "mein kampf".
La conception nazie de la nation est raciale et même raciste : le citoyen est défini comme "de sang allemand" la confession (protestant ou catholique) n'important guère. Pourtant les juifs sont exclus de la citoyenneté et, à ce titre, ne peuvent faire partie de la fonction publique (5ème point) et risquent même l'expulsion en cas de pénurie alimentaire (7ème point).
La constitution d'une "Grande Allemagne" rappelle les conceptions des pangermanistes de même que la volonté de rassembler tous les germanophones. Mais l'exclusion des "non-citoyens", et principalement des juifs, singularise le projet nazi, certes nourri de pangermanisme mais qui va au-delà de cette idéologie.

Question 4
En 1945, l'Allemagne, vaincue, voit son sort décidé à la conférence de Yalta puis à celle de Potsdam.
Son territoire, de même que sa capitale Berlin, doit être découpé en 4 zones occupées par les vainqueurs du conflit (Etats-Unis, URSS, Royaume-Uni, auxquels est rajoutée la France in extremis). Ses frontières seront réduites à l'est au profit de la Pologne, selon la ligne Oder-Neisse.
Enfin, il est prévu de procéder à une démilitarisation et à une dénazification de l'Allemagne.

Question 5
Ce document évoque la chute du mur de Berlin en novembre 1989 et la réunification de l'Allemagne qui s'ensuivit le 3 octobre 1990.
Il fait donc allusion à des changements territoriaux fondamentaux. Entre 1949 et 1989, la nation allemande a été séparée en 2 Etats (RFA à l'ouest, RDA à l'est), guerre froide oblige. A la suite de la chute du mur de Berlin (édifié en 1961), les deux parties de la ville et les deux Allemagnes ne forment plus qu'un seul et même territoire.

Question 6
Les "appréhensions" en question tenaient notamment à des litiges territoriaux hérités de la guerre, que la partition de l'Allemagne avait laissés en suspens pendant près d'un demi-siècle : la reconnaissance des frontières orientales de l'Allemagne, côté polonais et côté tchèque sont deux problèmes quasiment résolus.
La résurgence d'un nationalisme allemand inquiétait Israël; mais en fin de compte, l'Allemagne a reconnu l'Etat hébreu et la responsabilité du génocide des juifs par les nazis.
Enfin, les craintes d'une sorte de néo-colonialisme allemand sur l'est de l'Europe se sont estompées, à mesure que des pays comme la Pologne, la Hongrie et le République tchèque réussissaient leur transition économique (au point aujourd'hui d'être membres de l'Union européenne).

Question 7
Insister en introduction sur l'éclatement du territoire allemand issu de Saint-Empire romain germanique.
Mentionner ensuite les étapes menant à l'unité allemande : de l'union douanière du Zollverein en 1834 à l'œuvre unificatrice menée par le chancelier Bismarck. L'empire allemand par volonté politique, est devenu alors un Etat-nation surmontant ses divisions (pas seulement religieuses) à l'image de l'Italie de Cavour. (utiliser le document 1)
Bien montrer ensuite en quoi la conception de la nation allemande oriente les revendications puis les conquêtes territoriales. Partir du mouvement pangermaniste pour arriver à une version beaucoup plus extrême voire extrémiste de la nation allemande dans le discours nazi : d'une communauté linguistique, culturelle et historique, on passe à une communauté biologique et raciale qui exclut...et qui justifie la conquête "d'un espace vital", à l'est au détriment des peuples jugés inférieurs, les slaves notamment. (utiliser les documents 2 et 3)
Evoquer alors le sort de l'Allemagne en 1945, ultime résultat de sa politique expansionniste et raciste : parler de la défaite et des sanctions territoriales ainsi que de la dénazification, pour éviter le retour de telles conceptions d'une nation "aryenne".(document 4).
Ne pas négliger la guerre froide, curieusement absente (sinon en filigrane) des documents. Utiliser l'expression : "une nation, deux Etats" (RFA et RDA de 1949 à 1989).
Terminer en développant (grâce au document 6) le thème de la réunification consécutive à la chute du mur de Berlin.
Bien noter que la conception agressive de la nation allemande est révolue puisque "la situation explosive il y a 10 ans apparaît calme et stable aujourd'hui" en particulier sur les problèmes territoriaux liés aux frontières orientales du territoire allemand. La résurgence du nationalisme allemand comme l'émergence d'un néo-colonialisme économique, ne semblent plus guère d'actualité.

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