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Annales gratuites Bac ES : Texte de Saint Thomas d'Aquin

Le sujet  1996 - Bac ES - Philosophie - Commentaire d'un texte philosophique Imprimer le sujet
LE SUJET

Dégager l'intérêt philosophique du texte suivant en procédant à son étude ordonnée :

"L'homme est libre : sans quoi conseils, exhortations, préceptes, interdictions, récompenses et châtiments seraient vains. Pour mettre en évidence cette liberté, on doit remarquer que certains êtres agissent sans discernement, comme la pierre qui tombe, et il en est ainsi de tous les êtres privés du pouvoir de connaître. D'autres, comme les animaux, agissent par un discernement, mais qui n'est pas libre. En voyant le loup, la brebis juge bon de fuir, mais par un discernement naturel et non libre, car ce discernement est l'expression d'un instinct naturel (...). Il en va de même pour tout discernement chez les animaux.
Mais l'homme agit par jugement, car c'est par le pouvoir de connaître qu'il estime devoir fuir ou poursuivre une chose. Et comme un tel jugement n'est pas l'effet d'un instinct naturel, mais un acte qui procède de la raison, l'homme agit par un jugement libre qui le rend capable de diversifier son action."

SAINT THOMAS D'AQUIN

LE CORRIGÉ

I - LES TERMES DU SUJET

Les notions fondamentales de ce texte sont la liberté, la raison, l'instinct.
Etre libre c'est posséder un pouvoir intérieur qui permet de surpasser l'ordre naturel.
La raison est la capacité de connaissance et de formulation d'un choix. L'instinct, est dans l'usage que Saint Thomas fait de cette notion classique, aujourd'hui récusée par la science, cette force naturelle qui détermine l'action et la pensée des êtres chez lesquels il est présent.


II - ANALYSE DU PROBLEME

L'objectif de ce texte est de mettre en lumière le lien entre liberté et réflexion. Il s'agit pour l'auteur de situer l'homme par rapport aux autres êtres existant dans la nature.

L'homme possède-t-il une singularité qui le distingue des animaux et l'inscrit dans une sphère supérieure d'existence ? Ce qui est en jeu à travers la liberté, c'est donc la question de la spécificité de l'être humain au sein de la nature.

Cette identité spécifique de l'homme est-elle fondée sur une faculté qui lui est propre ? La liberté renvoie-t-elle à cette faculté comme à son fondement ultime ?

Les aboutissements de cette problématique sont essentiels, car si l'homme n'est pas libre, doté d'un pouvoir supérieur, il faut reconsidérer le sens et la possibilité même de la morale.


III - GRANDES LIGNES DE REFLEXION

La pensée de Saint Thomas se déploie en articulant la problématique morale, celle de l'identité singulière de l'humanité à la thématique de la connaissance.

Ainsi trois grands champs conceptuels se trouvent reliés et leur connexion ou combinaison constitue le fond sur lequel s'élabore la thèse de l'auteur.


IV - UNE DEMARCHE POSSIBLE

1 - L'affirmation de la liberté de l'homme

L'auteur pose en hypothèse que l'homme est libre. La démonstration de cette hypothèse s'effectue selon une double voie : d'un côté, la différenciation de l'homme et des êtres qui lui sont inférieurs ; de l'autre côté, la mise en relation de la liberté avec la faculté qui lui sert de base.

Enlever à l'homme sa liberté en tant que propriété ou caractéristique fondamentale, c'est rendre caducs les impératifs de la morale, priver de sens les sanctions, les récompenses des actions humaines.

En effet, si l'homme n'est pas libre, il ne peut être tenu pour responsable de sa conduite. Dans ces conditions, comment le blâmer ou le louer d'une façon justifiée ? Comment l'homme pourrait-il gouverner sa conduite selon des règles morales s'il ne peut s'extraire des grands déterminismes naturels ?

2 -Les modalités d'action des différents êtres

Les êtres inanimés ne possèdent aucune faculté de jugement. Ce sont des choses, confinées dans leur immédiateté, incapables d'émettre le moindre jugement et de déclencher par voie intérieure une réaction à une situation donnée.

Les animaux se situent à un degré plus élevé dans cette hiérarchie qui mène à l'humanité. ils sont dotés d'une capacité de perception et d'évaluation des situations dans lesquelles ils s'inscrivent. Mais leur jugement n'est que l'émanation des tendances naturelles instinctives qui les habitent et qui les empêchent d'accéder à une dimension rationnelle.

Si l'animal se décide en faveur de telle ou telle solution, c'est sous l'effet de mécanismes innés qui le rendent incapable d'un choix authentique.

3 - Liberté et raison

La liberté suppose la raison, c'est-à-dire un pouvoir supérieur d'analyse et de jugement qui transcende les déterminations naturelles. Agir librement, c'est d'abord penser rationnellement et non en fonction d'inclinations qui feraient des hommes des automates mus par des impulsions irrésistibles.

La raison permet de prendre une distance par rapport au réel et à soi-même. Elle procède selon une ligne objective, et se caractérise par son ouverture par opposition à l'instinct qui ferme le champ d'action de l'animal.


V - QUELQUES REFERENCES POSSIBLES

PLATON : République livre 7.
ARISTOTE : De l'âme
DESCARTES : Méditations métaphysiques
KANT : Critique de la raison pratique


VI - LES FAUSSES PISTES

- Il fallait bien saisir l'enjeu moral du texte et ne pas le passer sous silence.

- Ne pas réduire le statut intermédiaire des animaux à celui des êtres inanimés.

- Ne pas assimiler trop vite la raison et l'âme (dont il n'est pas question dans le texte).


VII - LE POINT DE VUE DU CORRECTEUR

Ce texte, très abordable, constitue un excellent prolongement de la réflexion menée en terminale sur les thèmes majeurs : liberté, connaissance, morale.

De plus, aborder la différence entre homme et animal, constitue toujours un sujet actuel, présent dans la réflexion physique et morale.

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