Le sujet 2007 - Bac ES - Sciences Economiques et Sociales - Question de synthèse |
Avis du professeur :
Le sujet porte sur les effets du progrès technique sur la
croissance économique. |
Il est demandé au candidat :
1. de construire le travail préparatoire qui fournit
des éléments devant être utilisés dans la synthèse.
2. de répondre à la question de synthèse,
— par une argumentation assortie d'une réflexion critique, répondant
à la problématique donnée dans l'intitulée ;
— en faisant appel à ses connaissances personnelles ;
— en composant une introduction, un développement, une conclusion pour
une longueur de l'ordre de trois pages.
Ces deux parties sont d'égale importance pour la notation.
Il sera tenu compte dans la notation de la clarté de l'expression et du soin
apporté à la présentation.
THEME DU PROGRAMME :
Accumulation du capital, progrès technique et croissance
I - Travail préparatoire (10 points)
Vous répondrez à chacune des questions en une dizaine de
lignes maximum.
1. Illustrer par un exemple les notions d' "innovation
technologique" et d' "innovation organisationnelle". (document 1)
(1 point)
2. Quel effet une innovation majeure peut-elle avoir pour une entreprise
sur "le choix de ses tarifs" ? (document 2) (2 points)
3. Quelles sont les conséquences d'une innovation de procédé sur l'offre
de biens et services ? (document 3) (2 points)
4. Quel lien peut-il y avoir entre la réalisation de gains de
productivité par les entreprises et la consommation de biens et de services ?
(document 3) (2 points)
5. Faire une phrase avec les valeurs en bleu gras. (document 4)
(1 point)
6. Expliquer à l'aide du document 4, l'accélération de la
croissance de la productivité constatée aux États-Unis entre les deux périodes
observées ? (2 points)
II - Question de synthèse (10 points)
Après avoir présenté les différentes formes du progrès technique, vous montrerez les effets de celui-ci sur la croissance économique.
Document 1
Innover consiste à introduire une nouveauté dans un domaine
particulier. Dans la sphère économique, l'innovation revêt différentes
modalités dont l'économiste autrichien Joseph Aloïs Schumpeter (1883-1950) a
établi une typologie qui inspire encore largement les auteurs contemporains.
Schumpeter spécifie cinq formes d'innovations [...].
Sur cette base, les auteurs contemporains distinguent deux grandes catégories
d'innovations. La première regroupe les innovations
technologiques - il s'agit d'innovations de produit ou d'innovations
de procédé [...]. Les innovations de procédé (ou de processus)
correspondent aux nouvelles techniques de production ou de commercialisation.
Les innovations de produit concernent les biens et des services nouveaux. Ces
innovations sont radicales lorsque les produits n'ont aucun équivalent
préexistant ; elles sont incrémentales lorsqu'elles se traduisent par
l'amélioration significative des performances de produits existants. La seconde
catégorie concerne les innovations organisationnelles qui correspondent à de
nouvelles formes d'organisation des entreprises ou des marchés.
Source : S. d'Agostino, "La dynamique de l'économie : l'innovation", Cahiers français, n°315, juillet-août 2003.
Document 2
Cependant, la distinction entre innovation de procédé et innovation
de produit n'est pas toujours facile à opérer [...]. [...]
Les économistes spécialistes de l'organisation industrielle s'intéressent
davantage aux conséquences de l'innovation en termes de pouvoir de marché qu'à
sa "nature" technologique, et opèrent la distinction (théorique)
entre innovation majeure, "drastique", et innovation mineure :
la première est suffisante pour permettre à l'entreprise concernée d'évincer
complètement ses concurrents et de s'affranchir de toute pression
concurrentielle pour le choix de ses tarifs (l'entreprise fixe alors un prix de
monopole). La seconde ne lui permet pas d'y échapper entièrement, et elle doit
alors vendre ses produits à un prix inférieur à celui qu'elle aurait fixé si
elle avait été seule sur son marché.
Enfin, d'autres analyses mettent en avant le type d'information que l'entreprise
mobilise pour innover [...]. Les entreprises qui se contentent d'appliquer
les connaissances et techniques mises en œuvre par d'autres entreprises
sont qualifiées d'imitatrices. Au contraire, les entreprises véritablement
innovatrices sont celles qui cherchent à produire des connaissances nouvelles,
et qui, en cas de succès (découverte), s'appuient sur ces connaissances pour
innover.
Source : L'économie française, comptes et dossiers, édition 2006, Insee.
Document 3
Source : J. Bourdin, Objectif
3% de recherche - développement : plus de recherche pour plus de
croissance, Les rapports du Sénat, n°391, 30.06.2004.
Document 4
Taux de croissance annuel moyen de la productivité du travail en %
|
1990 - 1995 |
1995 - 2001 |
||
|
Union européenne |
États-Unis |
Union européenne |
États-Unis |
Total économie |
2,3 |
1,1 |
1,7 |
2,2 |
Industries |
|
|
|
|
Industries |
|
|
|
|
Industries ne |
|
|
|
|
Source : Recherche-développement, financement et
croissance : quels choix pour la France dans l'Union européenne ?,
Rapport du Conseil d'analyse économique, 11.02.2005.
*TIC : Technologies de l'information et de la communication.
I - L'ANALYSE ET LES DIFFICULTÉS DU SUJET
Le sujet porte sur
les points du programme suivants : "Progrès technique
et évolution économique et sociale" et "Sources
et limites de la croissance". Le sujet -très classique- est
d'autant plus intéressant que la France connaît une insuffisance de croissance
depuis plusieurs années et que l’insuffisance des innovations est souvent
mise en avant pour l’expliquer.
Vous devez réfléchir au rôle que peuvent jouer les différents types d’innovation pour accélérer le rythme de la
croissance tant du côté de l’offre (des entreprises
qui fabriquent les biens et services) que du côté de la demande (la consommation des
ménages et l’investissement des entreprises et des administrations).
Les documents rappellent la distinction à faire entre les différentes innovations et
montrent leurs effets d’entraînement sur
l’offre et sur la demande. Leur lecture minutieuse vous permet de bien
traiter le travail préparatoire, puis de vous y référer dans votre synthèse.
Vous devez ajouter des connaissances
personnelles, notamment sur l'origine des
innovations en évoquant le rôle des entrepreneurs et l’importance des
investissements ainsi que sur l’absence d’automaticité des liens de
causalité entre innovations, gains de productivité et croissance.
Évitez de dévier du sujet en développant trop les relations entre progrès technique et emploi, largement détaillées dans le cours de Terminale.
II - LES OUTILS : SAVOIRS ET SAVOIR-FAIRE
Vous pouvez
mobiliser vos connaissances sur les éléments suivants :
● Le progrès
technique, une des sources de la croissance ;
● Les différents
types d’innovation (de produit, de procédé
et d’organisation) ;
● Les conséquences
des innovations sur la productivité globale des
facteurs et en particulier sur la productivité du travail ;
● Les effets
d’entraînement des gains de productivité
sur la croissance de l’offre et de la demande ;
● Le rôle de l’investissement, notamment en R&D, pour activer les innovations ;
● L’importance des TIC dans les innovations actuelles ou récentes et dans la croissance ;
● La lecture des textes doit viser à en relier les idées principales au sujet ;
● L’analyse du document 3 doit permettre de mettre en lumière des liens de causalité ;
● L’étude du document 4 passe notamment par la comparaison entre colonnes (UE / États-Unis et 1990-1995 / 1995-2001) et par quelques calculs rapides pour mettre les évolutions en évidence.
III - ELEMENTS DE RÉPONSE AU TRAVAIL PRÉPARATOIRE
1. Le
document montre la distinction entre plusieurs types
d’innovations selon leur nature. Illustrons-les par des
exemples :
● Le téléphone
mobile est l’exemple d’une innovation technologique qui
correspond à la mise sur le marché d’un nouveau
produit ;
● Le e-commerce (vente par Internet) est un exemple d’innovation organisationnelle qui modifie à la fois le fonctionnement des entreprises et du marché sur lequel elles vendent.
2. Une innovation majeure a pour effet de placer l’entreprise innovatrice en situation de monopole, généralement provisoire, soit parce qu’elle est la seule à commercialiser le nouveau produit, soit parce qu’elle a réussi au moins provisoirement à évincer ses concurrents. Cette entreprise peut alors fixer ses tarifs comme elle le souhaite en l’absence de pression de la concurrence.
3. En permettant d’accroître la productivité, c’est-à-dire l’efficacité des facteurs de production, une innovation de procédé favorise une augmentation de l’offre puisque l’entreprise peut produire une quantité supérieure de biens ou de services avec autant de moyens mis en œuvre.
4. Une hausse de la productivité des entreprises permet une hausse de la consommation des biens et services produits à deux conditions. Il faut qu’une partie des gains de productivité se traduise par une baisse des prix et que la demande soit élastique par rapport à ces variations de prix. Il faut en outre que les gains de productivité occasionnent des hausses de salaire qui élèvent le pouvoir d’achat et donc la consommation.
5. Entre 1995 et 2001, l’augmentation annuelle moyenne de la productivité du travail aux États-Unis a été évaluée à 10% dans les industries qui produisent des technologies de l’information et de la communication et à 4,7% pour les entreprises qui utilisent des TIC dans leur processus de production.
6. Entre les deux périodes (1990-1995 et 1995-2001), le rythme de croissance annuel moyen de la productivité du travail a doublé aux États-Unis en passant de +1,1% à +2,2%. Cette hausse vient des hausses de productivité du travail constatée dans les firmes fabriquant des TIC où le taux de croissance est très rapide (même s’il n’a augmenté que de 25%, passant de 8,1% à 10% par an) et dans les secteurs utilisant les TIC (le rythme de croissance y a quadruplé en passant de +1,2% à +4,7% par an). Au contraire, la productivité du travail qui n’augmentait quasiment pas dans les industries et services n’utilisant pas de TIC (+0,3%) y a très légèrement reculé (—0,2%). Les TIC, élément majeur d’innovation dans la période, ont joué un rôle moteur dans l’accélération de la productivité du travail aux États-Unis.
IV - UN PLAN POSSIBLE A LA QUESTION DE SYNTHÈSE
Introduction
On s’interroge souvent sur les causes de la faiblesse de la croissance de l’économie française et, plus généralement, sur le différentiel de croissance entre les pays de l’Union européenne et les États-Unis. L’évocation d’une "nouvelle économie" rappelle le rôle des innovations pour alimenter la croissance économique.
On est ainsi amené à s’interroger sur l’importance
du progrès technique comme facteur favorisant
l’accroissement de l’offre comme celle de la demande.
Il apparaît nécessaire de préciser d’abord
les différents types d’innovations qui peuvent concrétiser ce progrès
technique avant de montrer leurs effets
d’entraînement sur l’activité économique.
Partie 1 : Le progrès technique se concrétise par différentes formes d’innovations technologiques et organisationnelles.
A. Les innovations technologiques concernent tant les
produits que les procédés de fabrication
● Nouveaux produits et
nouvelles entreprises liés aux innovations et aux investissements (doc
1 et 2)
● Accroissement et diversification des activités
de production (tertiarisation)
● Nouveaux procédés de fabrication à
l’origine de gains de productivité (doc 3)
● Exemple des secteurs producteurs et
utilisateurs de TIC aux États-Unis (doc 4)
B. Les innovations organisationnelles transforment les
entreprises et les marchés
● Nouvelles formes
d’organisations des entreprises et des marchés (doc 1)
● Rôle moteur de l’entrepreneur
innovateur (Schumpeter) et des firmes innovatrices (position de monopole, rente
de situation) (doc 2)
● Importance des firmes imitatrices
pour la durabilité de la croissance (doc 2)
Partie 2 : Les différentes formes d’innovation ont un effet d’accélération de l’activité économique.
A. Les innovations et les gains de productivité
qu’elles génèrent activent l’offre
● Les innovations de produits,
sources de nouveaux profits, accélèrent l’offre ;
● Les gains de productivité dûs aux
innovations de procédé accroissent les profits et les ventes espérés, donc
l’offre (doc 3) ;
● Élargissant les ventes, les innovations
organisationnelles alimentent un essor de l’offre (doc 2) ;
B. En diversifiant l’offre et en élevant le pouvoir
d’achat, les innovations favorisent une hausse de la demande
● Innovations et gains de productivité
élèvent le pouvoir d’achat et la demande (surtout si l’élasticité
des prix est forte) (doc 3) ;
● Innovations et emplois créés alimentent
aussi une hausse de la demande solvable ;
● Innovations et diversification de
l’offre favorables à la demande en
satisfaisant ou en suscitant de nouveaux besoins ;
Conclusion
Avec aujourd'hui une croissance jugée insuffisante, la France et la zone Euro se doivent de trouver des moyens pour stimuler tant l’offre (et l’emploi) que la demande (et la satisfaction des besoins de leur population). Les théories, notamment celle de Schumpeter, comme l’expérience historique, en particulier l’exemple récent des États-Unis, montrent le rôle crucial du progrès technique lorsqu’il s’agit d’activer la croissance. Ceci vient rappeler la nécessité de stimuler la recherche et développement qui figurent parmi les principales sources de ces innovations si nécessaires.
V - LES "PLUS"
● Le rôle de l’investissement comme accélérateur des innovations et de la croissance (cf. Keynes) ;
● Le poids des innovations en matière d’organisation du travail (Taylorisme-Fordisme, Toyotisme) ;
● Les effets des innovations et des gains
de productivité sur l’emploi (effets favorables en générant de nouveaux
emplois, effets destructeurs de certains emplois avec risques d’atteindre
la demande et donc la croissance) ;
● L’analyse de Schumpeter de la
psychologie des entrepreneurs et notamment des innovateurs ;
● La référence à la stratégie de Lisbonne visant une "économie de la connaissance" en Europe ;
● Les mécanismes d’entraînement
international des innovations dans le cadre de la mondialisation.