Le sujet 2005 - Brevet Série Collège - Français - Rédaction |
Dans cette œuvre autobiographique, l'auteur relate un voyage familial
réunissant sa grand-mère, qu'il appelle bonne-maman, sa sœur aînée Françoise et ses
autres frères et sœurs.
Françoise, qui venait d'obtenir son permis de conduire, nous proposa d'effectuer
le trajet en deux étapes. Nous nous pliâmes aux désirs du chauffeur et embarquâmes
dans la vieille onze(1) familiale. Bonne-maman installa à portée de main sa provision de
morceaux de sucre et sa bouteille d'alcool de menthe(2) puis donna le feu vert.
5 -Et surtout, sois prudente ! recommanda-t-elle à Françoise.
Pauvre Françoise, la route fut pour elle un long calvaire, car bonne-maman, non
contente de tout ignorer de la conduite, se piquait en plus de donner des conseils.
-Attention au tournant... Prends garde à la voiture qui vient... Regarde ta
route... Ne va pas si vite... Ne te laisse pas distraire par tes sœurs et vous, ne lui parlez
10 pas... Laisse-le nous dépasser, va, nous avons le temps... Ralentis.
De temps à autre et pour se défouler, Françoise proposait hargneusement de céder
sa place, mais bonne-maman étant sourde, cette redoutable proposition n'avait, Dieu
soit loué, aucune chance d'aboutir.
En dépit de ce double pilotage, nous arrivâmes sans encombre jusqu'à Arles où
15 nous nous arrêtâmes pour passer la nuit. Peu habitués à fréquenter les hôtels, mis à part
le "Claridge", nous choisîmes naïvement un boui-boui(3) de dernière classe. Bonne-maman
s'en aperçut trop tard et bouda le dîner en guise de représailles. Elle était très polie et ne
fit aucune réflexion désobligeante à haute voix mais nous en chuchota quelques-unes
comme chuchotent les sourds, c'est-à-dire que toutes les personnes présentes dans la
20 salle à manger se tournèrent vers nous lorsque notre grand-mère nous dit en confidence :
-Ces haricots verts de conserve sont pleins de fils et toute cette huile d'olive me
restera sur l'estomac !
Cet aveu, des plus discrets, fut sans doute entendu jusqu'aux cuisines car, sans
doute pour faire bonne mesure, la salade qu'on nous servit par la suite flottait sur un
25 bain d'huile.
Bonne-maman pinça les lèvres et garda le silence jusqu'à la fin du repas. Elle se
rattrapa et donna libre cours à son indignation lorsque nous prîmes possession de nos
chambres. Elle ouvrit tous les lits, scruta les draps d'un œil soupçonneux et déclara
enfin d'une voix non dépourvue d'une légère satisfaction :
30 -J'en étais sûre, "ils" ont déjà servi !
Partant de là, il va de soi que les matelas se révélèrent avachis, les sommiers
défoncés, l'éclairage pisseux, le lavabo bouché et le petit coin douteux. En résumé,
notre grand-mère nous affirma qu'elle ne pourrait fermer l'œil de la nuit. Malgré tout,
comme il était grand temps de dormir, elle déposa une de ses serviettes de toilette sur
35 son oreiller, nous expliqua qu'elle s'isolait ainsi de la crasse, paraît-il visible sur la taie,
puis se coucha. Elle le fit avec une répugnance manifeste(4), ce qui ne l'empêcha pas de
dormir d'une seule traite.
Claude Michelet, Une fois sept, Éditions Robert Laffont, 1983.
(1) : vieille onze : II s'agit d'une "Traction", une automobile Citroën des années quarante et cinquante.
(2) : alcool de menthe : Alcool qui aide à lutter contre le mal des transports. On le prend à
raison de quelques gouttes versées sur un morceau de sucre.
(3) : boui-boui : établissement de qualité inférieure.
(4) : répugnance manifeste : dégoût évident.
REDACTION (15 points)
Quelques jours après être arrivés sur leur lieu de vacances, bonne-maman et ses petits-enfants visitent un village touristique. Fidèle à elle-même, la vieille dame se montre critique et exaspérante. Imaginez ce nouvel épisode dans lequel Françoise essaie de prouver à sa grand-mère sa mauvaise foi en lui reprochant son attitude.
Cet échange se fera sous le regard amusé du narrateur.
CONSIGNES :
Attention : Il sera tenu compte, dans l'évaluation :
I - QUELLE ANALYSE POUR CE SUJET ?
II - LES REACTIONS A CHAUD DU PROFESSEUR
C'était un sujet difficile et il convenait d'être très attentif aux consignes qui l'accompagnaient, notamment en ce qui concernait le lieu et les circonstances, le respect du mode d'énonciation du texte de Claude Michelet était obligatoire.
Il était essentiel de s'appuyer sur le texte initial pour dégager les traits de caractère de la grand-mère et demeurer dans une cohérence psychologique.
III - UN TRAITEMENT POSSIBLE DU SUJET
1. Le lieu et les circonstances :
a.
Le lieu :b. Les circonstances :
On pouvait imaginer comme point de départ de l'altercation une remarque critique de bonne-maman sur :
2. La dispute :
a. Arguments adressés par Françoise à bonne-maman :
Françoise pouvait souligner :
b. La réplique de bonne-maman :
On pouvait distinguer des réactions physiques (le rouge de la colère, la voix qui monte dans les aigus, le personnage qui glapit, qui s'étrangle en réponse à ce discours "musclé"...) et des arguments logiques d'une part, affectifs de l'autre.
Les arguments logiques pouvaient prendre le contre-pied de ceux que Françoise lui assénait.
Les arguments affectifs pouvaient évoquer le respect dû à son âge.
c. Une vive discussion :
Il convenait pour introduire les dialogues d'utiliser des verbes montrant la vivacité des échanges voire l'escalade de la violence. Exemples : rétorquer, répartir, reprendre vivement, asséner, affirmer catégoriquement, de façon péremptoire, adopter un ton sans réplique, tonner, glapir, exploser de colère ou d'indignation...
3. La conclusion :
Qui l'emportait ? Françoise ou bonne-maman ? Le première avait-elle le cran d'aller jusqu'au bout en disant ses quatre vérités à sa grand-mère ? Cette dernière était-elle capable d'entendre raison ? Quelle que soit votre solution, vous pouviez la faire commenter par le narrateur-adulte qui, selon la consigne, devait adopter un regard amusé.
IV - LES FAUSSES PISTES