Partager :

J’ai fait une demande de dérogation : témoignages

Témoignages sur la demande de dérogationDeux parents de collégiens ont procédé à une demande de dérogation pour des raisons bien différentes. L’une a abouti, l’autre non, avec dans les deux cas, des conséquences sur leur vie quotidienne comme sur celle de leurs enfants.


 

« J’ai voulu que mon fils change de collège pour un problème de transport »

Emmanuelle, mère de Jhoan, en 5ème au collège public de Morlaàs (64)

« L’année dernière, j’ai fait une demande de dérogation pour que mon fils fasse sa rentrée de sixième dans un collège hors secteur (Serres-Castet). Etant handicapée, il m’était difficile de l’emmener tous les matins à l’arrêt de bus situé à… 2 km ( !) de chez nous pour qu’il rejoigne son collège de secteur (Morlaàs). Il ne pouvait pas y aller à pied d’autant plus qu’aucun aménagement n’est prévu pour les piétons : on doit marcher sur le bas-côté dans la terre et l’herbe. Alors que si mon fils était affecté dans le collège hors secteur, il pouvait se rendre tout seul à l’arrêt de bus situé à… 200 mètres de la maison !

J’ai fait un courrier très motivé et j’ai joint ma reconnaissance de travailleur handicapé. J’ai fait relire ma lettre à un principal qui me l’a corrigée et reformulée. Je l’ai envoyée par la Poste à l’inspecteur d’académie mais aussi par mail. J’ai expédié une copie au principal du collège hors secteur et au conseiller général. J’ai relancé tout le monde, mais sans succès. Ma demande a été rejetée. On m’a dit qu’il y avait trop de dérogations.

Je ne suis pas la seule à subir les conséquences d’un mauvais découpage de la carte scolaire et des transports scolaires. Alors avec d’autres parents, on a mis en place un système de co-voiturage pour emmener et récupérer les enfants à l’arrêt de bus.

Je n’ai pas renvoyé une nouvelle demande de dérogation lorsque mon fils est passé en cinquième. Maintenant, il a ses amis, son petit frère va bientôt intégrer ce même collège. Il reste peut-être une autre solution : convaincre la compagnie de bus de se rapprocher de notre domicile ».

 

« J’ai demandé une dérogation dès la primaire pour que mes filles soient dans un bon collège »

Frédérique*, mère de Lisa* et de Eva*, élèves de la 6e à la 3e au collège Les Touleuses à Cergy (95)

« A l’époque, le collège de notre secteur n’avait pas une très bonne réputation. Je n’étais pas rassurée et j’ai décidé d’anticiper : j’ai demandé une dérogation pour que mes enfants alors en primaire rejoignent une école hors secteur située près du collège Les Touleuses bien mieux réputé. En étant inscrites dans cette école, mes filles avaient plus de chances d’intégrer ensuite ce bon collège. Elles évitaient ainsi leur établissement de secteur réputé plus sensible.

 

Dans ma demande de dérogation, je pensais que plusieurs éléments pouvaient jouer en ma faveur : ma situation de parent isolé et mon travail qui m’amenait alors à me déplacer souvent à l’étranger. J’avais demandé une attestation dans ce sens à mon employeur. Mais il me fallait aussi une adresse. Des amis habitant près de l’école et ayant eux-mêmes leurs enfants scolarisés là-bas, avaient certifié par écrit qu’ils étaient prêts à accueillir mes filles chez eux après la classe, voire à les loger pendant mes absences professionnelles. Cela n’a pas suffi à convaincre l’Inspection académique. Alors j’ai sollicité l’appui d’une relation politique locale et mon dossier est passé.

 

Avec du recul, j’ai contourné la carte scolaire plus par peur que par une véritable connaissance de la réalité du collège de secteur. Même si la majorité des parents préférait mettre leur enfant dans le privé ou faire des dérogations, d’autres se disaient très contents de la scolarité de leur enfant. Mais mon appréhension un peu irrationnelle a pris le dessus. J’étais même prête à acheter un petit studio à côté du bon collège. J’avais calculé que cela me reviendrait moins cher que de scolariser mes deux enfants dans le privé.

 

Aujourd’hui, je ne regrette rien, mes filles ont bien réussi leurs années. Mais au quotidien, c’était la course entre le domicile, le collège à 5km de là et mon travail à Paris. Il y avait toute une organisation à mettre en place. Ce n’était pas simple, mais ça en valait la peine ».

 

* Les prénoms ont été changés