Le palmarès des collèges 2018
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« On a renoncé à être exigeant avec les élèves »

Alain Morvan a été recteur des académies de Clermont-Ferrand, Amiens et Lyon. Très actif sur twitter , il a accepté de nous livrer sa vision du brevet.


Alain Morvan

Alain Morvan, ancien recteur des académies de Clermont-Ferrand, Amiens et Lyon.

« Cette poussée des résultats, en particulier des mentions, au DNB 2015, prouve que l’on a exploité à fond la logique inflationniste qui avait été inaugurée en 2006, lorsqu’on a décidé de rajouter les mentions. C’était probablement mieux lorsqu’il n’y en avait pas. Aujourd’hui, cela crée un appel d’air supplémentaire, une course éperdue vers de meilleurs résultats dans laquelle s’engouffrent les académies et les départements. Mais ce sont des chiffres gonflés artificiellement par un effondrement du niveau des sujets, par un laxisme conscient et surtout par le renoncement à être exigeant avec les élèves.

 

« Arrêtons de faire de la bienveillance un objectif pédagogique ! »

La conception idéologique de la pédagogie est que l’école doit être « bienveillante ». Elle doit s’assurer qu’aucun élève ne craigne l’institution scolaire, ne se sente en position de faiblesse. Mieux encore. Il faudrait faire en sorte que l’élève soit… content ! Bien sûr que la bienveillance va de soi, mais sans aller jusqu’à devenir un objectif pédagogique premier. Nous avons un devoir d’exigence vis-à-vis des élèves, de leur famille, et même de la Nation. Il faut inciter les enfants à faire le plus d’efforts possibles afin qu’ils se perfectionnent, gagnent en savoir, en culture et en confiance en eux-mêmes. Et ce n’est pas en leur donnant des notes et des mentions qui ne correspondent pas à leurs efforts qu’on y arrivera.

 

« Il faut muscler le brevet »

Notre devoir est de défendre les institutions scolaires, et le brevet en fait partie. C’est un rite républicain, un rite de passage aussi, le premier examen dans la vie d’un élève, avec son cérémonial, ses épreuves, son anonymat. Je considère qu’il ne doit pas disparaître et je regrette qu’on le dévalue encore davantage dans l’avenir : au DNB 2017, le contrôle continu représentera 400 points contre 200 aujourd’hui. Or le vrai défi se trouve dans le face-à-face entre l’élève et sa copie le jour des épreuves. Il faut maintenir le brevet en le rendant plus crédible, plus sérieux, en le repensant en termes d’exigence et de succès. On pourrait par exemple décider chaque année de rajouter deux ou trois lignes à la dictée, qui, au fil des ans, est devenue offensante pour les candidats par sa médiocrité.

 

« La France s’en remettrait si on supprimait les mentions »

Si cette réhabilitation du brevet doit se faire au prix d’une catégorisation entre les bons élèves, les moyens et les moins bons, il faut tout de même l’accepter. Ceux qui auront réussi l’examen, auront conquis quelque chose qui a du sens. Pour les autres, l’entrée en seconde n’est pas conditionnée par le brevet. Y échouer ne va pas empêcher la terre de tourner. Quant aux mentions au DNB, je pense que la France s’en remettrait si on les supprimait. Ce serait une bien moindre tragédie que la fin des sections européennes et des classes bi-langues, ou que la mise à mort des langues anciennes, absurdités démagogiques voulues par la réforme du collège ».

 

Retrouvez Alain Morvan sur twitter : @ajfmorvan



Brevet : des résultats trop beaux ?