Le canal de Suez

Hugues, professeur d'Histoire-géographieFrance examen vous ouvre la porte de la Salle des Profs.

Hugues, professeur d'Histoire-géographie,
vous invite à revenir sur les principaux aspects géographiques, historiques et économiques de la construction et de l'exploitation du canal de Suez.

Les anniversaires sont toujours l'occasion de se remémorer les bons souvenirs. C'est ce que fait l'Egypte depuis juillet 2006 : En effet, le pays fête le cinquantenaire de la nationalisation du canal de Suez, symbole de son indépendance politique et économique.

Le canal traverse l'isthme de Suez entre Port-Saïd sur la mer Méditerranée et le golfe de Suez sur la mer Rouge. Rectiligne et dépourvu d'écluses, long de 163 km et d'une largeur de 60 à 400 m, il raccourcit jusqu à 65 % les distances entre l'Asie et l'Europe en permettant d'éviter le passage par le Cap de Bonne Espérance.

Inauguré en novembre 1869, dix ans après le premier coup de pioche, il est l'?uvre d'un homme. Du moins pour sa conception ; car sa réalisation a coûté la vie à environ 125 000 Egyptiens emportés par les maladies, sur le million et demi qui ont travaillé sur le chantier. Cet homme, c'est Ferdinand de Lesseps, diplomate, ingénieur français, et ancien vice-consul de France à Alexandrie.

La Compagnie universelle du canal de Suez était alors une société de droit privé détenue par des investisseurs français et britanniques. En 1875, en situation de banqueroute, l'Egypte a dû vendre ses parts au gouvernement de Londres. Le Royaume-Uni exerçait d'ailleurs un contrôle strict du canal depuis qu'en 1882, il a imposé un protectorat de fait sur l'Egypte ; et ce, même si la Convention de Constantinople de 1888 prévoyait que le canal était "libre et ouvert, en temps de guerre comme en temps de paix, à tout navire". En 1936, le Royaume-Uni a même obtenu le droit d'y maintenir des troupes. Après-guerre, cette situation est devenue insupportable pour le nationalisme arabe. Elle devait conduire au retrait britannique, effectif en juin 1956.

Dès le mois suivant, débutait la crise de Suez. En réaction au refus des Etats-Unis et du Royaume-Uni de financer la construction du barrage d'Assouan sur le Nil, Nasser , président depuis 1954, a nationalisé le 26 juillet 1956 la Compagnie du canal et en a saisi les biens. Dans la nuit du 29 au 30 octobre, les Israéliens ont attaqué le Sinaï, première étape d'un scénario établi secrètement avec les Français et les Britanniques. Ceux-ci lançaient le 30, un ultimatum aux belligérants pour le retrait de leurs troupes à 16 km du canal. Seuls les Israéliens, fidèles au plan, ont obtempéré. Alors, après le bombardement des bases aériennes égyptiennes le 31, Français et Britanniques ont pris d'assaut le 5 novembre Port-Fouad et Port-Saïd au nord du canal.

Mais "l opération Mousquetaire" a été un échec : les Soviétiques ont menacé Paris et Londres de représailles nucléaires tandis que les Etats-Unis ont fait pression en attaquant la livre sterling sur les marchés financiers. Le cessez-le-feu du 6 a été suivi, à partir du 15, du retrait progressif des soldats britanniques, français et israéliens, remplacés par les premiers casques bleus de l'Histoire. Le canal devait rouvrir en mars 1957, sous contrôle plein et entier de l'Egypte.

Aujourd'hui, il fait la richesse du pays : avec plus de 3,5 milliards de dollars en 2006, les recettes du canal de Suez, constituent la troisième source de devises de l'Egypte, derrière le tourisme et les transferts des travailleurs émigrés. Environ 17 000 navires transitent par le canal dans l'année. Et comme la mondialisation repose avant tout sur le transport maritime de marchandises, de lourds travaux d'aménagements en cours sont engagés pour permettre en 2012 le passage des plus gros porte-conteneurs et supertankers et ainsi accroître le trafic.

50 ans après sa nationalisation, l'avenir du canal de Suez paraît donc ensoleillé. Et ce sont finalement, ces lendemains radieux qui sont les clés d'un anniversaire réussi.

Hugues Febvre, professeur d'Histoire-géographie, octobre 2007.