La fusion nucléaire peut-elle être une solution énergétique de demain ?

. Demain, l'énergie ? . La fission nucléaire . La fusion nucléaire . Les freins à son développement . Le projet ITER
Yannick, professeur de PhysiqueFrance examen vous ouvre la porte
de la Salle des Profs.

Yannick, professeur de Physique,
vous présente la fusion nucléaire, ses enjeux et l'état d'avancement de la mise en ?uvre du projet ITER,
sans oublier l'enthousiasme et les critiques qu'elle suscite.


Demain, l'énergie ?


Les sociétés modernes sont de plus en plus gourmandes en énergie. Une fois que nous aurons épuisé les ressources de pétrole et de gaz naturel de la planète, que ferons-nous ? On estime que le problème se posera sérieusement d'ici 2050. Ce n'est pas très réjouissant !

Nous essayons, bien sûr, de recourir à d'autres formes d'énergie, comme les énergies éolienne (énergie du vent), hydraulique (énergie de l'eau des rivières) ou marémotrice (énergie des courants marins). Mais les dispositifs sont très coûteux et les quantités d'énergie produites sont négligeables devant les besoins.

La fission nucléaire


Seule l'énergie nucléaire semble être capable de faire face à la demande. C'est en 1942 que la première pile atomique à fission est mise au point aux USA : elle s'appelle Zoé. En France, il faut attendre 1963 pour que la première centrale nucléaire d'EDF soit opérationnelle. Encore maintenant, les centrales nucléaires fonctionnent avec de la fission nucléaire (On casse en deux, les noyaux des gros atomes d'uranium). Mais ce genre de réaction a montré ses limites en termes de pollution.

La fusion nucléaire


Le second grand type de réaction nucléaire provoquée est la fusion. Voyons d'un peu plus près de quoi il s'agit. Vous l'avez certainement appris à l'école, le noyau d'un atome est formé de neutrons et de protons. Les protons se repoussent entre eux car ils sont positifs. Ce qui permet au noyau de l'atome de rester compact et de ne pas exploser. Ce ne sont pas les forces de gravitation qui sont à l'origine de ce phénomène car bien qu'elles soient attractives, elles sont trop faibles.

La fusion nucléaire

La cohésion du noyau est due aux "interactions fortes" qui s'exercent entre les protons et les neutrons. Les noyaux les plus stables correspondent donc à une juste proportion de neutrons par rapport aux protons. Ainsi, des petits noyaux tels que le noyau de deutérium (1 proton et 1 neutron) et le noyau de tritium (1 proton et 2 neutrons) seraient plus stables s'ils fusionnaient en 1 noyau d'hélium (2 protons et 2 neutrons) en laissant un neutron seul. Cette stabilisation correspond à une perte d'énergie pour ces noyaux : moins ils ont d'énergie, plus ils sont stables.

C'est cette d'énergie cédée par la matière qui fusionne que l'on espère récupérer un jour, pour en faire de l'électricité. Plus généralement, on appelle fusion, la réunion de deux noyaux légers en un noyau plus lourd. La réaction que nous avons décrite est, a priori, la fusion, la plus accessible de nos jours. C'est d'ailleurs cette réaction qui a lieu au c'ur du soleil et qui lui permet de briller si fort.

Sur le papier ça marche, et les avantages semblent nombreux par rapport à la fission. Par exemple, il n'y aurait STRONG>pas de déchets radioactifs comme pour la fission car les produits formés seraient de l'hélium : c'est un gaz inoffensif et inerte chimiquement. Ensuite, une fusion produit environ STRONG>10 fois plus d'énergie qu'une fission !

Les freins à son développement


Dans les faits, les choses se compliquent. Même si on sait réaliser la fusion à l'unité depuis plusieurs années, on est loin de pouvoir la réaliser à grande échelle. Le problème principal, c'est la température énorme qu'il faut atteindre. En effet, pour rapprocher les deux noyaux d'atomes à fusionner, il faut vaincre les forces de répulsions électrostatiques. C'est très difficile car cette force augmente d'autant plus que la distance est courte, et ce n'est que passée une certaine proximité que l'attraction de l'interaction forte compense les répulsions. Il y a donc une énergie préalable à investir pour réussir une fusion.

Cet investissement énergétique se fait par le biais de l'agitation microscopique de la matière, c'est-à-dire une température élevée. Rendez-vous compte, il faut au moins 100 000 000 C (alors que la surface du soleil n'est qu'à 6 000 C). Aucun "récipient" n'est capable de supporter cette température, sans se dégrader. Actuellement, on tente de se passer de "récipient" en maintenant les réactifs en lévitation magnétique.

Le projet ITER


Projet ITERLe projet le plus prometteur dans le domaine est certainement le projet ITER (International Thermonuclear Experimental Reactor). Il date de 1988. Loin de faire l'unanimité, il a été mis de coté à plusieurs reprises. Il possède même son "fan club" sur Internet (http://www.iterfan.org/).

Depuis 2003, il revient sur le devant de la scène scientifique mondiale. Le site retenu l'an dernier par la commission d'experts est Cadarache, dans le sud de la France. Mais les polémiques à son sujet, ont repris de plus belles. Selon certains, ce projet n'a jamais eu pour objectif de créer de l'électricité mais seulement d'amener des crédits pour faire de la recherche fondamentale. Pire encore, il semblerait que l'obtention des réactifs nécessaires à la fusion et l'entretien du réacteur produisent une pollution radioactive égale voir supérieure à un réacteur classique à fission.

La réalité est certainement à mi-chemin entre les perspectives idylliques que nous ont fait miroiter les partisans de la fusion et le tableau pessimiste qu'en font les détracteurs du projet ITER. Une seule chose est sûre : il va falloir trouver des solutions et vite !

Yannick Devos, professeur de Physique, novembre 2007.