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Annales gratuites Bac 1ère STI : Actualité des récits moraux

Le sujet  2007 - Bac 1ère STI - Français - Dissertation Imprimer le sujet
Avis du professeur :

Le sujet traite de l'actualité des récits moraux.
Ce n'est pas si facile, car on peut se demander s'il ne s'agit pas pour les lecteurs d'aujourd'hui d'une littérature plutôt destinée à la jeunesse et pourquoi elle serait moins susceptible d'intéresser les adultes.

LE SUJET


Objet d'étude : convaincre, persuader et délibérer.

Texte :

Henry de Monfreid : Les derniers jours de l'Arabie heureuse1, 1935.
Chapitre X : "La gazelle du sultan."

       [...]
   1          Le sultan Yaya2 possédait une gazelle merveilleusement apprivoisée ; ses
       yeux profonds semblaient exprimer des pensées humaines et on s'attendait à
       chaque instant au miracle de la parole.
              C'était cependant une gazelle très commune, née dans la solitude des
  5   hauts plateaux du Yémen. Un pâtre l'avait trouvée toute petite auprès de sa
       mère blessée et il l'avait donnée à une chèvre à la place du chevreau qu'on avait
       fait rôtir. Elle s'ébattait maintenant dans les jardins du sultan, se mirait avec
       grâce dans l'eau tranquille des bassins. À l'appel de son maître elle accourait en
       bonds harmonieux portée semblait-il par d'invisibles ailes.
 10         Yaya l'avait toujours auprès de lui, couchée à ses pieds, quand il rendait
       la justice, et bien des fois il fut plus clément pour la détresse humaine quand le
       regard limpide et doux de ces grands yeux se levait sur lui.
              Elle mangeait dans sa main et venait l'éveiller s'il tardait trop, lorsque
       résonnait l'appel de la prière. Elle le suivait en tous lieux, et prenait part à sa vie
 15   comme si réellement elle avait appartenu au monde des hommes.
              En cela elle ne différait pas des autres gazelles, ses sœurs, car toutes se
       font aimer par la même grâce délicate. L'énigme de leurs yeux profonds trouble
       un peu l'homme inquiet devant le mystère, aussi imagine-t-il tout ce qui plaît à
       son cœur et met-il en ses pauvres bêtes si simples une âme pareille à la sienne.
 20         Un soir, assez tard dans la nuit, Osman3, en quittant le sultan, aperçut la
       gazelle au milieu du parc, broutant au clair de lune. Le lieu était désert. Une idée
       inattendue, brusque et précise comme la lueur d'un éclair quand elle fait surgir
       de la nuit les plaines et les montagnes, lui traversa l'esprit ; cette bête, vraiment,
       tenait-elle au cœur de son ami autant que lui-même ?

 25         La parole de son père lui revint en mémoire : "Ne sois jamais le familier
       d'un sultan, car son amitié est vaine..."
              II caressait doucement la gazelle, tandis que ces pensées mélancoliques
       montaient du fond de son cœur... Brusquement, cédant à une impulsion, d'un
       geste peut-être involontaire, il la saisit, l'enveloppa dans son manteau et s'enfuit.
 30         Il sortit des jardins sans être vu. Arrivé chez lui il enferma la bête dans une
       chambre retirée de sa maison où personne ne pouvait soupçonner sa présence.
       Cela fait, il alla se coucher et médita jusqu'au matin.
              Ce jour-là était jour de marché ; il fit acheter pour six piastres (3 francs)
       une jeune gazelle toute semblable à celle qu'il avait emportée la nuit dernière.
 35         Il la fit dépecer par ses serviteurs et donna l'ordre d'en préparer la viande
       pour le repas du midi.
              — Je vais te confier un grand secret, dit-il à sa femme, un secret que tu
       dois garder jusque dans la tombe si tu tiens à mon honneur et à ma vie. Puis-je
       me fier à toi ?
 40         — Ô mon ami, si les femmes dit-on, sont bavardes, elles savent dire
       uniquement ce qu'elles veulent et ton secret sera enseveli en moi comme le plus
       précieux trésor de l'avare.
              — Eh bien, écoute, ô Haléma. Hier, sans le vouloir, j'ai blessé la gazelle
       du sultan, mon maître. Pour éviter son courroux, je l'ai achevée et ce matin nous
 45  la mangerons..."
              Le soleil n'était pas encore au milieu de sa course que déjà les hérauts4
       parcouraient la ville promettant une fortune à qui retrouverait la gazelle du
       sultan.
              Des amis vinrent voir la femme d'Osman et parlèrent de la passionnante
 50  affaire. Les suppositions les plus extravagantes couraient de bouche en bouche,
       tous prétendaient savoir. Haléma les écoutait avec un sourire intérieur car elle
       seule savait la vérité. Quel orgueil de détenir le mot d'une si prodigieuse
       énigme ! mais quelle amertume de passer pour une ignorante !...
              — Vous qui vivez si retirée, lui disait-on, vous ne pouvez pas savoir...
 55  etc...
              — Non, ma chère, taisez-vous, lui répondait-on, quand elle voulait parler,
       je suis bien informée, croyez-moi, etc..."
              C'était intolérable, au-dessus de ses forces de faible femme... elle n'y
       résista pas tant la joie, la volupté d'étonner, lui ôtait tout discernement.
 60         Elle conta la chose en grand mystère et avec force serment à sa meilleure
       amie... et une heure après le sultan était informé.
              Le gouverneur du palais arriva au moment où les deux époux achevaient
       de manger la gazelle.
              Osman fut amené, entouré de soldats en armes, et jeté brutalement dans
 65  le cachot des condamnés à mort.
              Questionné, il avoua sur-le-champ, disant qu'il avait tué la gazelle par
       accident. Il offrit au sultan de la remplacer ; une autre sans doute s'apprivoiserait
       aussi bien.
              Mais le sultan refusa de l'entendre, tant un pareil crime était monstrueux.
 70         II fit saisir tous les biens de son ancien ami et beaucoup pensèrent que la
       disparition de cette gazelle était un prétexte pour remplir les coffres du
       souverain. Il ordonna ensuite qu'il eût la tête tranchée, ce qui mettait fin à toutes
       les revendications ultérieures.
              Osman restait insensible à une sentence aussi cruelle et ses amis le
 75  virent avec admiration marcher au supplice sans le moindre trouble. Il était
       souriant et calme comme un juste que rien ne peut émouvoir.
              Le sultan voulut assister à la punition du coupable. Il était assis entouré de
       ses courtisans, - les anciens amis d'Osman qui maintenant étaient les plus
       acharnés contre lui. - Ils lui disaient :
 80         — Voyez, sire, quel cynisme5 quelle dureté de cœur, pas le moindre
       remords, il semble joyeux d'avoir offensé Votre Majesté, son bienfaiteur et son
       ami et sa perversité est si grande que la mort même lui est indifférente. Que
       Votre Majesté ne lui fait-elle pas crever les yeux et couper les mains pour
       l'envoyer mourir abandonné dans le désert."
 85         Cependant, à la vue de cet homme qui allait mourir, le souvenir de l'ami
       d'autrefois éveilla en son cœur un peu de pitié. Il se revit, assis à ses côtés,
       lisant les strophes d'Omar Kayan6, devant la mer éternelle, au moment où le
       messager lui apporta la terrible nouvelle de son avènement7 ; elle lui parut alors
       passer sur son destin, comme l'ombre d'un corbeau en travers de sa route...
 90         II allait faire le geste généreux du pardon quand son intendant, cet ancien
       esclave qu'Osman avait sauvé et qui lui devait tout, jeta aux pieds du souverain
       la tête à demi carbonisée d'une gazelle qu'il avait découverte derrière la maison
       de son bienfaiteur.
              À cette vue, la fureur étouffa la pitié naissante et le sultan donna l'ordre
 95   fatal.
              — Merci, Ali, dit Osman à l'ancien esclave qui venait de réveiller contre lui
       la colère du souverain, merci, tu me rends aujourd'hui la mort que j'ai écartée de
       toi naguère. Mais tu viens de tromper ton maître en voulant le flatter : cette tête
       n'est pas celle de la bête bien-aimée qu'il pleure aujourd'hui sans que ma mort
100  ignominieuse puisse le consoler.
              "Prends cette clé et qu'il plaise au sultan notre seigneur d'envoyer sur-le-
       champ deux gardes dans ma maison. Dans la chambre du second étage,
       derrière l'appartement des femmes, il y a là la vraie gazelle ; pas un poil n'y
       manque. Je te demande en grâce, et ceci est ma dernière volonté, d'avoir la tête
105  tranchée en m'agenouillant sur elle.
              Le bourreau déjà était prêt. Du doigt il vérifiait le tranchant de son sabre et
       Osman, toujours calme, demeurait agenouillé.
              L'Imam voulut attendre le retour de l'envoyé, soit pour confondre
       l'imposteur, si la tête qu'il avait montrée n'était pas celle de la vraie gazelle ou
110  bien pour accabler Osman de son nouveau mensonge.
              Il n'attendit pas longtemps. Rapide comme la foudre, la gazelle, aussitôt
       libérée, bondit à travers la foule et sauta sur son maître en le couvrant de
       caresses.
              Le sultan, d'abord muet de stupeur, crut à un miracle. Transporté de joie il
115  s'élança vers Osman, l'embrassa, et le pressa sur son cœur avant même que le
       bourreau ait délié ses mains.
              Le jour même Osman voulut quitter la ville. En vain le sultan le supplia de
       pardonner son injuste fureur, de rester près de lui, et d'accepter des présents
       magnifiques en compensation de tout le mal qu'il lui avait fait.
120         — Non, je te remercie. Aucun présent ne peut payer une amitié fidèle.
       Permets-moi de me retirer dans ma palmeraie de Kauka8 où nous avons connu
       le dernier baiser de l'amitié sincère. J'ai imaginé cette histoire pour savoir si
       dans ton cœur je comptais plus qu'une gazelle de 6 piastres... Si tu veux faire
       quelque chose pour moi, pardonne à ce malheureux esclave qui a menti pour
125  m'accuser. Il a fait comme tant d'autres pour qui la vie d'un homme compte bien
       peu quand elle doit servir à flatter le souverain. Tous les courtisans qui
       t'entourent sont ainsi et je voudrais que cet exemple te mette en garde contre le
       poison de leur flatterie pour qu'il ne corrompe pas à jamais le cœur généreux
       que Dieu t'a donné.
130         "Je veux aller vivre loin des hommes et des villes, au milieu de mes
       esclaves et de mes troupeaux, dans la nature généreuse, indifférente et sans
       haine.
              "Puissè-je, un jour, mourir comme mon père dans le calme d'un beau
       soir, sans interrompre le chant d'une jeune esclave."

1 L'Arabie heureuse : désigne l'actuel Yémen, pays situé â l'extrême sud du désert arabique.
2 Sultan Yaya : souverain qui régna sur le Nord Yémen de 1918 à 1948.
3 Osman : ami d'enfance du sultan Yaya qui en a fait son premier conseiller.
4 Hérauts : messagers.
5 Cynisme : brutalité, absence de scrupules.
6 Omar Kayan : 1050-1123 : poète et savant perse.
7 Avènement : moment où Yaya est devenu sultan, à la mort de son père.
8 Kauka : ville des bords de la Mer Rouge, très éloignée des terres du sultan.

Henry de Monfreid, Les Derniers jours de l'Arabie heureuse, 1935.
Chapitre X "La gazelle du sultan"

Le texte respecte la ponctuation et la manière d'écrire les nombres de l'édition. (Gallimard 1935)

Dissertation

"... Je voudrais que cet exemple te mette en garde" déclare Osman au sultan Yaya.
En prenant appui sur l'exemple de "La gazelle du sultan" et sur d'autres apologues (fables ou contes) que vous connaissez, vous vous demanderez si les récits à valeur morale peuvent instruire et intéresser les lecteurs d'aujourd'hui.

LE CORRIGÉ


I - QUELLE ANALYSE POUR CE SUJET ?

Sujet

Contraintes

"Je voudrais que cet exemple te mette en garde", déclare Osman au sultan Yaya.

En prenant appui sur :
— l'exemple de la "Gazelle du sultan"
— sur d'autres apologues (fables ou contes) que vous connaissez

Contrainte explicitement contenue dans le libellé : utiliser
— l'exemple unique fourni par le sujet
— les exemples fournis par le cours
— les exemples fournis par la culture personnelle : fables et contes.

Vous vous demanderez si les récits à valeur morale peuvent instruire et intéresser les lecteurs d'aujourd'hui.

Contrainte implicite :
— réfléchir sur la différence entre "instruire" et "intéresser".
— la précision "lecteur d'aujourd'hui".

Caractéristiques générales du texte attendu :
Il s'agit de produire une dissertation littéraire, qui doit être écrite comme un essai.
Les allusions au texte du corpus sont obligatoires, celles à votre culture littéraire acquise en cours ou non, sont indispensables si vous ne voulez pas écrire un devoir avec un seul exemple. En général, tous les élèves connaissent au moins les contes qu'on leur a racontés dans leur enfance.

 

II - UN TRAITEMENT POSSIBLE DU SUJET

TYPES DE PLAN POSSIBLES :

A. Beaucoup de candidats vont sans doute penser à un plan analytique développant la définition proposée par le sujet, puis proposant un dépassement, une ouverture :
1. L'apologue : un récit qui intéresse
2. L'apologue : une morale qui instruit.
3. D'autres formes susceptibles d'intéresser et d'instruire à la fois.

— Ce plan présente un avantage : il permet aux candidats qui ont peu étudié l'apologue pendant l'année d'ouvrir dans la troisième partie sur les autres formes argumentatives au programme : notamment l'essai et le dialogue. Ils peuvent ainsi utiliser ce qu'ils ont lu pendant l'année.

— Mais attention ! Cet avantage peut se transformer en inconvénient. Ce plan s'éloigne un peu trop de l'enjeu du sujet : la valeur morale des fables et contes. Il néglige par ailleurs la précision apportée à la fin du libellé, "lecteur d'aujourd'hui", qui a son importance (cf. plan suivant)

B. Nous allons proposer un autre type de plan plus axé autour de cette précision finale. La question posée par le sujet est de savoir si les récits à valeur morale sont encore efficaces dans le monde qui nous entoure. Le verbe pouvoir ("si les récits à valeur morale peuvent instruire…") suggère précisément que cette efficacité tend peut-être à s'affaiblir, voire à disparaître. Il importe alors de se demander pourquoi.
1. Le récit à valeur morale : un genre traditionnel qui appartient plutôt au passé.
2. Mais une portée universelle qui rend leur contenu encore efficace quelle que soit l'époque.
3. Cependant, ces récits sont-ils toujours adaptés aux changements de notre époque ?

PREMIÈRE PARTIE : UN GENRE TRADITIONNEL

1. L'apologue : un récit tourné vers le passé

La plupart des fables ou contes racontent une histoire qui, pour nous lecteurs d'aujourd'hui, se déroulent dans le passé, voire dans des temps immémoriaux (où la mémoire ne peut remonter) :
— les références temporelles peuvent être absentes : dans le texte proposé, une note précise que l'histoire se déroule dans le Nord Yémen entre 1918 et 1948. Mais dans le conte, nulle référence à des faits historiques.
— les références temporelles sont la plupart du temps très vagues : dans la fameuse formule, l'imparfait renvoie à des temps antérieurs vagues.
— ou alors elles sont totalement invraisemblables : au temps où les bêtes parlaient, au temps des fées, etc.

Ainsi, cela ne renvoie pas au monde contemporain que connaissent les "lecteurs d'aujourd'hui".

2. L'apologue transmet des valeurs morales traditionnelles.

Par sa définition même (un texte narratif bref, avec des personnages allégoriques, ayant une visée moralisatrice), l'apologue contient en général un enseignement simple :

— les morales sont souvent conventionnelles (en tout cas en apparence). Cf. certaines conclusions des fables de La Fontaine inspirées de proverbes ou en étant elles-mêmes devenues : "la raison du plus fort est toujours la meilleure" ("Le Loup et l'Agneau"), "Tel est pris qui croyait prendre" ("Le Rat et l'Huître"), "Travaillez, prenez de la peine,/ C'est le fonds qui manque le moins" ("Le Laboureur et ses Enfants")

—les valeurs transmises par ces morales sont celles qui fondent une société stable : la famille par exemple. Le petit chaperon rouge, dans la version proposée par les frères Grimm, n'obéit pas à sa mère qui a formulé dès le début du conte un interdit : il ne faut pas parler à des inconnus. La petite fille va être punie, en étant dévorée par le loup, parce qu'elle n'a pas respecté l'interdit maternel. A l'opposé, certains contes rappellent les devoirs des parents envers leurs enfants : dans "Le Petit Poucet" de Perrault, les parents, n'ayant pas l'argent pour les élever, abandonnent leurs enfants. Mais ils sont terriblement malheureux et donc les premiers punis de leur acte.

3. Des lectures pour les enfants

Pour ces raisons, les apologues sont souvent cantonnés aujourd'hui à deux types de lecteurs :
— les enfants : on raconte des histoires aux tout petits.
— les élèves : on apprend à l'école Les Fables de La Fontaine.

Or, ce ne fut pas toujours le cas. Les Fables de La Fontaine sont certes dédiées au Dauphin, le fils du Roi, mais elles s'adressent à un public d'adultes. Il en est de même des contes philosophiques de Voltaire ou des contes de Perrault et des frères Grimm.

Transition

Ainsi, il est réducteur de limiter l'apologue à un genre figé ancré dans le passé. Sa force est, au contraire, d'être universel.

DEUXIÈME PARTIE : UNE PORTEE UNIVERSELLE

1. Cette dimension universelle tient à leur forme

C'est la raison pour laquelle ils intéressent tous les lecteurs, âges et époques confondues.

l'art du récit : Henry de Monfreid arrive à capter notre attention en alternant dialogue et récit, en personnifiant la gazelle, ou en retardant la chute. Voltaire nous captive par l'action et l'humour. La Fontaine nous séduit par l'inventivité des situations et le pittoresque de ses descriptions.

— des personnages souvent stéréotypés qu'il est facile de rejeter ou d'aimer: la belle-mère de Cendrillon et ses deux filles sont extrêmement méchantes, par opposition à l'héroïne, à la fois belle et douce. Le renard, dans les fables de La Fontaine, incarne évidemment la ruse.

2. Elle tient aussi à leur valeur morale.

En fait, les apologues touchent à des questions universelles car profondément humaines : l'amitié dans "La Gazelle du sultan", l'amour dans "Les deux Pigeons" de La Fontaine, la recherche du bonheur dans "Candide", etc.

3. Ces récits traversent les époques :

— La transmission des apologues fut longtemps orale. Les "Contes de mille et une nuits" y font clairement : ils ne sont d'ailleurs signés d'aucun nom d'auteur.

— La plupart des contes ont subi de multiples réécritures au fil des siècles qui les ont enrichis, transformés, tout en gardant la trame initiale : c'est le cas du Petit Chaperon rouge. Il en est de même des fables : La Fontaine a puisé la plupart de ses sujets dans l'Antiquité, chez Esope ou Phèdre.

— les fables sont souvent enseignées à l'école primaire, de générations en générations… Et elles sont souvent apprises par cœur.

Transition : ainsi, l'apologue a une visée universelle. Pourtant, on peut se demander s'il est toujours aussi efficace pour "les lecteurs d'aujourd'hui".

TROISIÈME PARTIE : UNE EFFICACITE REMISE EN QUESTION

1. Une société qui a subi de profondes mutations

— Notre société contemporaine traverserait, aux dires de certains sociologues, une crise des valeurs. La famille est ainsi souvent mise à mal : les mariages des contes de fée sont bien dépassés même s'ils font encore rêver les petites filles ; les enfants ont plus de mal à accepter l'autorité parentale ; les belles-mères des familles recomposées n'ont plus la méchanceté de la marâtre de Cendrillon.

Comment les contes traditionnels peuvent-ils avoir dans ces conditions le même retentissement ?

— l'autre profonde mutation est liée à la transmission des enseignements moraux. Les leçons de morale ont depuis longtemps disparu des programmes scolaires. Les enfants reçoivent leur éducation à la morale par d'autres formes que le livre : les dessins animés jouent un rôle fondamental. Sans doute obéissent-ils aux mêmes ressorts que les apologues traditionnels (les personnages simples, des conclusions rassurantes pour l'enfant, etc.). Mais ce n'est plus de la littérature.

2. Une littérature qui doit s'adapter

Jamais la littérature de jeunesse n'a été aussi féconde. Les auteurs s'adaptent et proposent des contes mieux adaptés aux réalités de notre époque : le divorce des parents, le chômage, les difficultés scolaires, les différences raciales, etc.

On a cependant du mal à imaginer que ces contes, quelle que soit leur qualité, puissent traverser les siècles comme leurs illustres prédécesseurs.

CONCLUSION :

— Il faut reprendre l'essentiel de la réflexion : les apologues ont encore de beaux jours devant eux. Mais sans doute sont-ils menacés dans une société qui aime les changements et a vite fait de brûler ce qu'elle a adoré.

— il faut aussi ouvrir la perspective : à nous, lecteurs, parents ou futurs parents, de rester vigilants en transmettant aux générations futures cette tradition riche pour éviter qu'elle ne disparaisse un jour complètement. N'oublions pas que Blanche Neige est un conte très ancien, repris par les frères Grimm, et non pas un dessin animé de Walt Disney.

 

III - LES FAUSSES PISTES :

  Il ne fallait surtout pas :

proposer un devoir confus, désorganisé ;
prendre des exemples dans d'autres formes littéraires que le conte ou la fable ;
oublier l'une des deux dimensions : instruire et intéresser.

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