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Annales gratuites Bac 1ère STI : Points communs et différences

Le sujet  2006 - Bac 1ère STI - Français - Questions Imprimer le sujet
Avis du professeur :

La première question vous demande de dégager les points communs et les différences entre les quatre premiers textes du corpus (Verlaine, Colette, Proust et Roud). Il ne faut pas perdre de vue que l'objet d'étude est la poésie, et que c'est sous cet angle que les textes doivent être comparés. La deuxième question est une reformulation de trois des idées essentielles du texte de Charles Dantzig.
Le sujet ne présente pas de réelle difficulté, puisqu'il s'agit de comparer quatre textes dans leur différence et leur ressemblance et de reformuler, ensuite, les idées principales d'un texte. En revanche, la lecture et l'analyse des textes, difficiles, ont pu vous rebuter.

LE SUJET


Texte A

 1  L'échelonnement des haies
    Moutonne à l'infini, mer
    Claire dans le brouillard clair
    Qui sent bon les jeunes baies.

 5  Des arbres et des moulins
    Sont légers sur le vert tendre
    Où vient s'ébattre et s'étendre
    L'agilité des poulains.

    Dans ce vague d'un Dimanche
10  Voici se jouer aussi
    De grandes brebis aussi
    Douces que leur laine blanche.

    Tout à l'heure déferlait
    L'onde, roulée en volutes(1),
15  De cloches comme des flûtes
    Dans le ciel comme du lait.

Stickney, 75
Paul Verlaine, Sagesse, III, 1881.

(1) Volutes : en spirales

 

Texte B

Dans le chapitre intitulé "Jour gris", la narratrice évoque la région de son enfance.

 1      J'appartiens à un pays que j'ai quitté. Tu ne peux empêcher qu'à cette
    heure s'y épanouisse au soleil toute une chevelure embaumée de forêts.
    Rien ne peut empêcher qu'à cette heure l'herbe profonde y noie le pied des
    arbres, d'un vert délicieux et apaisant dont mon âme a soif... Viens, toi qui
 5  l'ignores, viens que je te dise tout bas : le parfum des bois de mon pays égale
    la fraise et la rose ! Tu jugerais, quand les taillis de ronces y sont en fleurs,
    qu'un fruit mûrit on ne sait où — là-bas, ici, tout près —, un fruit insaisissable
    qu'on aspire en ouvrant les narines. Tu jugerais, quand l'automne pénètre et
    meurtrit les feuillages tombés, qu'une pomme trop mûre vient de choir, et tu
10  la cherches, et tu la flaires, ici, là-bas, tout près...
        Et si tu passais en juin, entre les prairies fauchées, à l'heure où la lune
    ruisselle sur les meules rondes qui sont les dunes de mon pays, tu sentirais,
    à leur parfum, s'ouvrir ton coeur. Tu fermerais les yeux, avec cette fierté grave
    dont tu voiles ta volupté, et tu laisserais tomber la tête, avec un muet
15  soupir...
        Et si tu arrivais, un jour d'été, dans mon pays, au fond d'un jardin que je
    connais, un jardin noir de verdure et sans fleurs, — si tu regardais bleuir, au
    lointain, une montagne ronde où les cailloux, les papillons et les chardons se
    teignent du même azur mauve et poussiéreux, tu m'oublierais, et tu
20  t'assoirais là, pour n'en plus bouger jusqu'au terme de ta vie !

Colette, Les Vrilles de la Vigne, 1908

 

Texte C

Le narrateur part se promener sur une petite route normande.

 1       [...] Mais, dès que je fus arrivé à la route, ce fut un éblouissement. Là où
    je n'avais vu, avec ma grand-mère, au mois d'août, que les feuilles et comme
    l'emplacement des pommiers, à perte de vue ils étaient en pleine floraison,
    d'un luxe inouï, les pieds dans la boue et en toilette de bal, ne prenant pas de
 5  précautions pour ne pas gâter le plus merveilleux satin rose qu'on eût jamais
    vu et que faisait briller le soleil ; l'horizon lointain de la mer fournissait aux
    pommiers comme un arrière-plan d'estampe japonaise(1) ; si je levais la tête
    pour regarder le ciel entre les fleurs, qui faisaient paraître son bleu
    rasséréné(2), presque violent, elles semblaient s'écarter pour montrer la
10  profondeur de ce paradis. Sous cet azur, une brise légère mais froide faisait
    trembler légèrement les bouquets rougissants. Des mésanges bleues
    venaient se poser sur les branches et sautaient entre les fleurs, indulgentes,
    comme si c'eût été un amateur d'exotisme et de couleurs qui avait
    artificiellement créé cette beauté vivante. Mais elle touchait jusqu'aux larmes
15  parce que, si loin qu'elle allât dans ses effets d'art raffiné, on sentait qu'elle
    était naturelle, que ces pommiers étaient là en pleine campagne, comme des
    paysans sur une grande route de France. [...]

Marcel Proust, Sodome et Gomorrhe, II, Chapitre Premier, 1921.

(1) Estampe japonaise : gravure représentant souvent un paysage stylisé
(2) Rasséréné : ravivé, encore plus bleu

 

Texte D

Extrême-automne

 1  Qu'il est donc rapide, le glissement d'une saison moribonde vers la saison
    future ! Hier encore (il semble que c'était hier), ce grand pays sous le soleil
    sec de septembre s'abandonnait aux charrues. Elles ouvraient dans l'herbe
    rase des prairies de longues blessures roses d'heure en heure élargies. À la
 5  pointe du dernier sillon, Fernand, l'épaule nue et dorée comme au plein de
    l'été, une main sur le soc(1) éblouissant, portait de l'autre à ses lèvres une
    pomme si rouge que le ciel autour d'elle avivait son bleu trop doux. Les
    chevaux las s'endormaient au repos et leurs crinières, en se penchant vers le
    sommeil, démasquaient par à-coups le ruban d'horizon, ses pans de collines,
10  ses villages minuscules délicatement dessinés, avec le compte exact des
    toitures et des arbres leurs couleurs posées côte à côte sans une bavure, à
    peine amorties au fond de l'air mûri comme un vin d'or. [...]

Gustave Roud, Air de Solitude, 1945.

(1) Soc : fer de charrue servant à labourer

 

Texte E

 1  POESIE : [...] La poésie n'existe pas à l'état naturel. Loin d'être un fait qui
    préexisterait à l'homme et que celui-ci découvrirait, elle est sa création et son
    triomphe. Quand Balzac(1) parle de poésie du commerce, ce n'est pas qu'elle
    s'y trouve, c'est qu'il l'y met. Sa sensibilité lui fait transfigurer certains
 5  éléments du commerce que les autres ne regardaient même pas. La poésie
    est la forme supérieure de l'imagination. C'est pour cela qu'on la croit
    apparentée à la divination.
        Or, elle n'a rien à voir avec la Pythie, les mystères d'Eleusis, Dr Imbéné
    Ravalavanavano amour argent examens(2). La poésie, c'est du travail. Il en
10  résulte un chant faisant croire qu'elle se passe dans le ciel. Le poète marche
    sur une corde. Elle est posée par terre.
        La poésie ne se trouve pas que dans les vers. Elle est là où le talent la
    met. La poésie est le résultat de toute bonne littérature. Mallarmé(3) : "Mais,
    en vérité, il n'y a pas de prose" (réponse à l'Enquête de Jules Huret(4)).
15      Le poème est l'objet ; la poésie, éventuellement, le résultat.
        La poésie est même le résultat de tout art réussi : un tableau est de la
    poésie, un beau vêtement bien porté est de la poésie, etc. Est poésie le
    résultat de toute activité humaine menée à bien. Un geste gracieux est de la
    poésie, un mouvement de troupe bien accompli est de la poésie. [...]

Charles Dantzig, Dictionnaire Egoïste de Littérature Française, 2005.

(1) Balzac (1799-1850) : romancier français
(2) Tous les noms cités dans cette phrase sont ceux de devins ou de mages censés prédire l'avenir
(3) Mallarmé (1842-1898) : poète français
(4) Jules Huret (1863-1915) : journaliste à L'Echo de Paris. Il fit paraître, en 1891, une enquête sur l'évolution de la littérature.

 

QUESTIONS (6 points)

1. Dégagez les points communs et les différences entre les quatre premiers textes du corpus. (3 points)
2. Reformulez trois des idées essentielles du texte de Charles Dantzig. (3 points)

LE CORRIGÉ


I - L'ANALYSE ET LES DIFFICULTES DU SUJET

Sujet

Contraintes

1. Dégager les points communs et les différences entre quatre textes poétiques

Etude et comparaison du fond et de la forme

2. Reformulation de trois idées essentielles

Analyse d'un texte argumentatif sur la poésie

PREMIERE QUESTION

Quels sont les points communs et les différences entre les quatre premiers textes du corpus ?

II - LES PISTES DE REPONSES

Le plan choisi, et qui nous a semblé le plus simple, est de type dialectique.
Il consiste à dégager :

1. Les points communs
2. Les différences

PREMIeRE PARTIE : LES POINTS COMMUNS

1. La nature : elle est présente, pour protéger l'homme, l'accompagner dans ses moments de bonheur comme de tristesse. Elle est personnifiée (il convenait de relever les nombreuses métaphores).

Verlaine : "l'échelonnement des haies moutonne".
Colette
: "s' y épanouisse au soleil toute une chevelure".
Proust :
"une brise légère faisait trembler les bouquets rougissants".
Proust :
"ce grand pays sous le soleil [...] S'abandonnait aux charrues".

2. Les animaux (sous forme réelle ou métaphorique) :

Verlaine : "moutonne, les poulains, grandes brebis".
Colette:
"les papillons".
Proust
:"des mésanges bleues".
Proust :
"les chevaux las".

3. La perception : les sens évoqués par les quatre poètes

Verlaine : "claire dans le brouillard clair, le vert tendre, ce vague d'un Dimanche, laine blanche, le ciel comme du lait".
Colette : "une chevelure embaumée de forêts, un vert délicieux, le parfum des bois, un fruit insaisissable qu'on aspire en ouvrant les narines, un jardin noir de verdure, bleuir".
Proust : "en pleine floraison, les pieds dans la boue, le plus merveilleux satin rose qu'on eût jamais vu, bleu rasséréné, presque violent, cet azur, mésanges bleues".
Roud : "le soleil sec, longues blessures roses, épaule nue et dorée, pomme si rouge, bleu trop doux, couleurs posées côte à côte sans une bavure, air mûri comme un vin d'or".

DEUXIeME PARTIE : LES DIFFERENCES

Les quatre textes sont d'époques différentes : XIXe pour Verlaine, XXe pour Colette, Proust et Roud.

Les textes de Colette, Proust et Roud sont rédigés en prose poétique alors que celui de Verlaine "rime". Il se présente plus exactement sous la forme de quatre quatrains aux rimes embrassées (abba), structure simple. Les trois autres témoignent du dépassement opéré à la fin du XIXe siècle à propos du clivage poésie/prose.

Les textes de Colette et Proust sont écrits à la première personne du singulier alors que les autres ne le sont pas. La première s'efforce de donner à voir au lecteur, tout comme Verlaine, un lieu. Mais il est investi d'une charge affective forte, liée à l'enfance qu'elle voudrait partager avec le lecteur qu'elle interpelle directement par le recours à la deuxième personne du singulier. Le second essaie de retrouver le temps perdu. Cela justifie l'emploi des temps du passé dans ces deux extraits. De même, la description de la beauté et de l'émotion qu'elle fait naître est renforcée par l'emploi de phrases exclamatives : "pour n'en plus bouger jusqu'au terme de ta vie ! qu'il est donc rapide, le glissement d'une saison vers la saison future !"

Le texte de Roud quant à lui se fonde essentiellement sur le recours à de nombreuses métaphores.

DEUXIEME QUESTION

Vous deviez reformuler trois des idées essentielles du texte de Charles Dantzig.

PREMIERE IDEE : la poésie nait du regard de l'homme sur le monde

Dantzig explique que la poésie est une invention de l'homme. Elle consiste à transformer certains éléments de la nature, du monde, que d'autres ne perçoivent pas.

Pour reprendre la formule de Victor Hugo : "le poète est un voyant".

DEUXIEME IDEE : LA POESIE EST LA FORME SUPERIEURE DE L'IMAGINATION.

La poésie est un travail et non pas le fruit d'une inspiration "pure". Dantzig considère comme un contresens d'assimiler la poésie à la divination, comme on le faisait dans l'Antiquité.

"Le poète marche sur une corde. Elle est posée par terre".

TROISIEME IDEE : la poésie est le résultat de toute activité humaine menée à bien.

La poésie est le résultat d'un travail bien fait, on peut donc étendre la notion de poésie à tout résultat mené à bien, dans tous les domaines de l'activité humaine : un tableau, un geste, un vêtement...

 

III - LES FAUSSES PISTES

 Il ne fallait surtout pas :

● mélanger les étapes du texte de Dantzig : l'origine de la pensée, sa définition, ses perspectives.

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