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Annales gratuites Bac L : Démocraties populaires

Le sujet  2008 - Bac L - Histoire - Etude d'un ensemble documentaire Imprimer le sujet
Avis du professeur :

Le sujet porte sur les démocraties populaires (les pays de l'Est de l'Europe "satellisés" par l'URSS) et leur évolution pendant la guerre froide, de 1948 (coup de Prague) à 1989 (chute du mur de Berlin).
Le sujet ne présente pas de difficulté particulière. La "soviétisation" des pays de l'Est est largement abordée pendant l'année, quand vous avez étudié la guerre froide puis l'histoire de l'Europe.

LE SUJET


Les démocraties populaires et leur évolution (1948-1989)

Liste des documents :
Document 1 : Les démocraties populaires au milieu des années 1950
Document 2 : La Pologne en 1956
Document 3 : Extraits de la constitution roumaine de 1965
Document 4 : A Budapest en 1956
Document 5 : Déclaration de Vaclav Havel lors de son procès (21 février 1989)

Première partie
Analysez l'ensemble documentaire en répondant aux questions suivantes :
1. A partir du document 3, dégagez les caractéristiques idéologiques, politiques et économiques du régime des démocraties populaires.
2. Décrivez et expliquez leur situation par rapport à l'Union soviétique en vous appuyant sur le document 1.
3. Identifiez les événements évoqués par les documents 2, 4 et 5.
4. Quels sont les acteurs et les thèmes de la contestation (documents 2, 4 et 5) ?
5. Quel autre acteur dont le rôle a été essentiel dans l'effondrement des démocraties populaires n'apparaît pas explicitement dans l'ensemble documentaire ?

Deuxième partie
À l'aide des réponses aux questions, des informations contenues dans les documents et de ses connaissances, le candidat rédigera une réponse organisée au sujet :

Les démocraties populaires et leur évolution (1948-1989)


Document 2 : La Pologne en 1956
La classe ouvrière vient d'administrer au gouvernement une leçon cuisante. La manifestation des ouvriers dans les rues de Poznan, ce sombre jeudi de juin dernier, avait une valeur de message à l'adresse du gouvernement : "Cela suffit ! Nous ne voulons plus vivre ainsi ! Il faut abandonner au plus vite le mauvais chemin sur lequel nous nous sommes fourvoyés !"
II ne suffit pas de remplacer les hommes de l'équipe gouvernementale. Il faut modifier tout le système de gouvernement. Il est nécessaire de remplacer tous les rouages défectueux de notre modèle du socialisme. Il peut y avoir des voies différentes vers le socialisme : chaque pays a droit à la souveraineté et à l'indépendance.
L'énorme vague qui traverse le pays exige la démocratisation de notre vie publique (...).

Source : Extrait du "discours de Wiadislas Gomulka(1) devant le comité central du Parti ouvrier polonais unifié", 20 octobre 1956 in Pavel Tigrid, Amère révolution, Albin Michel, 1977.

(1) Écarté du pouvoir en 1949 pendant la période stalinienne, Gomulka est rappelé à la tête du parti communiste et de l'État sous la pression populaire en 1956.

Document 3 : La constitution roumaine de 1965
Art. 2
- Dans la république socialiste de Roumanie, tout le pouvoir appartient au peuple, libre et maître de son sort. Le pouvoir du peuple est fondé sur l'alliance des ouvriers et des paysans. En étroite union, la classe ouvrière - classe dirigeante dans la société -, la paysannerie, les intellectuels, les autres catégories de travailleurs, sans distinction de nationalité, édifient le régime socialiste, créant les conditions pour le passage au communisme.
Art. 3 - Dans la république socialiste de Roumanie, le parti communiste roumain est la force dirigeante de toute la société.
Art. 4 - Détenteur du pouvoir, le peuple exerce ce pouvoir par la grande Assemblée nationale et les conseils populaires, qui sont les organes élus au scrutin universel, égal, direct et secret. (...)
Art. 5 - L'économie nationale de la Roumanie est une économie socialiste fondée sur la propriété socialiste des moyens de production. (...)
Art. 28 - La liberté de parole, de presse, de réunion, de meeting et de manifestation est garantie aux citoyens de la république socialiste de Roumanie.
Art. 29 - La liberté de parole, de presse, de réunion, de meeting et de manifestation ne peut être employée dans des buts hostiles au régime socialiste et aux intérêts des travailleurs.

Source : cité dans Notes et Études documentaires, n°3314, 20 août 1996.

Légende : A chaque flambée, un gavroche(1). Ils n'ont connu que le paradis rouge, ils en brûlent les images.

(1) Nom d'un personnage d'enfant dans le roman de Victor Hugo, Les Misérables, qui meurt lors d'une tentative de révolution à Paris en 1832.

Source : photographie parue dans Paris Match,  11 novembre 1956.

Document 5 : Déclaration de Vaclav Havel lors de son procès (21 février 1989)
(...) La Charte 77(1) a été créée et continue à exister en tant que communauté informelle s'efforçant de recueillir systématiquement des informations sur le respect des droits de l'homme dans notre pays (...). Depuis douze ans, la Charte 77 n'a cessé d'attirer l'attention des autorités sur la distance importante qui sépare leurs obligations juridiques et la pratique réelle de notre société. Depuis douze ans, elle a mis en garde ses interlocuteurs contre des phénomènes inquiétants et des signes de crise. Elle a mis en lumière les violations des droits constitutionnels, les comportements arbitraires, l'incompétence des autorités ou le gâchis provoqué par elles. En agissant de la sorte, la Charte 77 exprime l'opinion d'une grande partie de notre société. Depuis douze ans, nous n'avons cessé d'inviter les pouvoirs publics à prendre part à un dialogue sur ces sujets. Depuis douze ans, les autorités de notre pays sont restées sourdes à notre campagne, se bornant à nous emprisonner ou à nous poursuivre (...).

La Charte 77 a toujours insisté sur le caractère non violent et juridique de son activité. Elle n'a jamais eu pour objectif de troubler l'ordre dans la rue. (...)

Je dois faire un aveu : le 16 janvier j'avais bien l'intention de quitter la place Wenceslas après avoir déposé une couronne à la mémoire de Jan Palach(2). Si je suis resté plus d'une heure, c'est surtout parce que je ne pouvais en croire mes yeux, il est arrivé quelque chose que je n'aurais jamais cru possible. L'intervention tout à fait inutile de la police contre ceux qui voulaient, en silence et sans publicité, déposer des couronnes près de la statue a réussi en un instant à transformer un groupe de passants en une foule de protestataires.

Source : V. Havel, Essais politiques, Paris, Calmann-Lévy, 1990, p. 251 et suivantes.

(1) Texte signé par des dissidents tchécoslovaques en 1977 demandant le respect des droits de l'homme dans leur pays,
(2)Jan Palach : le 16 janvier 1969, Jan Palach, étudiant, s'immole par le feu pour protester contre la répression du printemps de Prague et la "normalisation" de la société tchécoslovaque.

LE CORRIGÉ


I - L'ANALYSE ET LES DIFFICULTES DU SUJET

· Les enjeux

Le sujet porte sur les démocraties populaires, c'est-à-dire sur les pays de l'Est de l'Europe qui pendant la guerre froide ont été "satellisés" par l'URSS communiste.
L'ensemble documentaire étudie leur évolution de 1948 (date du coup de Prague qui fait passer la Tchécoslovaquie jusque-là démocratique dans le "giron" soviétique) à 1989 (chute du mur de Berlin et année où le communisme s'effondre dans les différents PECO).

· Les limites de l'ensemble documentaire

Il permet de voir les caractéristiques de ces régimes communistes ainsi que les nombreuses contestations internes qu'ils ont pu connaître, qui aboutiront finalement à la chute des dictatures mises en place sous le contrôle de Moscou.
Il n'y a pas de difficulté particulière dans la partie des questions. Remarquez que la question n°5 vous amène à réfléchir sur les limites des documents proposés. Ils ne présentent que certains aspects de la problématique du sujet.

II - LA PROBLEMATIQUE

Autrement dit : pour la 2e partie qui est en fait une mini composition, vous devez à tout prix fournir des connaissances personnelles et ne pas vous limiter aux seules informations contenues dans les documents.
Le sujet est chronologique. Votre plan doit l'être aussi, en utilisant bien la date charnière de 1956 qui revient dans deux documents, qui marque la "déstalinisation". Il s'agit de montrer l'amplification des contestations à l'intérieur des "démocraties populaires" (c'est leur nom officiel et trompeur) jusqu'à leur chute finale.
Comment caractériser les "démocraties populaires" et pourquoi ont-elles fini par échouer ?
Tel est l'enjeu de ce sujet.

III - LES REPONSES AUX QUESTIONS

1ère partie
1. La constitution roumaine permet de dégager les caractéristiques (et les contradictions) d'une "démocratie populaire" : 
- L'idéologie communiste est très présente : 
Le pouvoir est censé être donné au peuple, notamment aux anciennes classes sociales dominées, qui doivent s'allier : les ouvriers et les paysans (pensez à la faucille et au marteau du drapeau de l'URSS ! )
- L'économie est également typiquement communiste (art.5) avec la propriété collective des moyens de production.
- Politiquement les ambiguïtés sont nombreuses : le peuple est censé bénéficier du suffrage universel (art.4) mais le parti communiste est le parti unique (art.3) ; de plus, les libertés individuelles accordées dans l'article 28 sont limitées dès l'article 29 car elles ne doivent pas servir à critiquer le régime en place.

Les démocraties populaires sont donc en réalité des dictatures communistes qui tentent de maintenir une illusion de démocratie.

2. D'après la carte, ces pays d'Europe centrale et orientale (PECO) ont été satellisés par l'URSS après la 2ème guerre mondiale. La plupart ont été libérés, puis occupés par l'Armée Rouge, ce qui a permis ensuite leur intégration forcée dans le "bloc" communiste dominé par Moscou. Ce bloc a une forte cohérence idéologique, politique, économique (CAEM créé en 1949) et militaire (les pays sont membres du Pacte de Varsovie à partir de 1955). Seule la Yougoslavie de Tito évite un alignement complet.

3. Le document 2 évoque les manifestations ouvrières de Poznan en Pologne en 1956, le document 4 mentionne l'insurrection de Budapest en Hongrie la même année et le document 5 révèle la volonté de commémorer en Tchécoslovaquie le fameux "Printemps de Prague" de 1968, qui réclamait un "socialisme à visage humain".

4. La contestation a toujours le même thème : la démocratisation nécessaire du régime en place.
Les principaux acteurs sont des ouvriers (déçus par le régime qui était censé les favoriser), des étudiants, des hommes politiques réformateurs (comme Gomulka) ou des intellectuels comme le poète Vaclav Havel, qui symbolise les "dissidents" des pays communistes et deviendra le Président de la Tchécoslovaquie après la chute des démocrates populaires.

5. Cette dernière question est ambiguë et on peut penser à plusieurs réponses.
On peut penser à Gorbatchev, le n°1 soviétique à partir de 1985, qui par sa politique réformatrice a relâché le contrôle de l'URSS sur les démocraties populaires, ce qui a finalement provoqué leur effondrement.
Mais si cette chute a eu lieu, c'est aussi parce que les Etats-Unis ont offert un contre modèle qui a souvent fasciné la jeunesse des pays de l'Est, fondé sur la liberté politique (démocratie) et la société de consommation.
Le pape Jean-Paul II a également joué un rôle non négligeable, mais surtout pour la Pologne, car il a soutenu Solidarnosc et s'est montré un adversaire farouche du communisme.

Deuxième  partie

Le plan chronologique peut être le suivant :

I. 1948-1956 : des démocraties populaires sous étroite surveillance (période du stalinisme)
Parler de la mise en place des démocraties populaires et du coup de Prague. Dans l'introduction, rappel du tournant de 1947 et de la doctrine Jdanov avec la création du Kominform, dans un contexte de guerre froide.
Insister sur la cohérence idéologique, politique mais aussi économique (CAEM en 1949) et militaire (Pacte de Varsovie de 1955) du "bloc" communiste. Ne pas oublier la brouille entre Tito et Staline, qui impose la "soviétisation" de presque tous les PECO.

II. 1956-1975 : le temps des révoltes inabouties
1956 est une année-clé : c'est le temps de grands mouvements (Pologne, Hongrie) dans un contexte de "déstalinisation" voulu par Khrouchtchev.
Mais l'assouplissement du contrôle de Moscou est très relatif et la répression est utilisée. Avec l'arrivée au pouvoir de Brejnev en 1964, le temps de l'immobilisme commence. Pourtant, "Printemps de Prague" en 1968, à nouveau pour réclamer une démocratisation. Comme en 1956, ouvriers, étudiants et hommes politiques réformateurs s'allient. Mais la force est encore utilisée (doctrine Brejnev de la "souveraineté limitée").
Noter que la Roumanie refuse de participer à la répression et sort du Pacte de Varsovie (déjà, en 1956, après les événements de Budapest, l'Albanie s'était éloignée du modèle soviétique).

III. 1975-1989 : vers le succès de la dissidence et la chute du communisme
Parler absolument de l'Acte final de la conférence d'Helsinki (1975), signé par les Etats-Unis et l'URSS : cette dernière s'engage à respecter les droites de l'Homme.
Les "dissidents", intellectuels en lutte contre la dictature communiste, utiliseront ce texte international pour légitimer leur action (ex : la Charte 77 du document 5).
L'arrivée au pouvoir de Gorbatchev en 1985, l'appui du pape Jean Paul II et l'influence des Etats-Unis feront le reste. Dans les années 1980, la Pologne et la Hongrie sont à la pointe du changement (ex : Lech Walesa et son syndicat Solidarité). L'effondrement des démocraties populaires révèle la faillite du modèle soviétique, à la fois politique (manque de liberté) et économique (mauvaises conditions de vie). Les frustrations de la société, latentes depuis les années 1950, ont abouti à des contestations de plus en plus efficaces.

IV - LES outils : savoirs et savoir-faire

Mots clés

Principaux acteurs

Dates

Communisme

Staline

1948 (coup de Prague)

Dictature

Khrouchtchev

1956 (Poznan, Budapest)

Soviétisation

Brejnev

1968 (printemps de Prague)

Satellisation

Gorbatchev

1975 (conférence d'Helsinki)

Répression

Gomulka

1989 (chute du mur de Berlin)

Déstalinisation

Imre Nagy

 

Dissidence

Dubcek

 

 

Havel

 

 

Walesa

 

 

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