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Annales gratuites Brevet Série Collège : Texte de Suzanne Prou

Le sujet  1998 - Brevet Série Collège - Français - Questions Imprimer le sujet
LE SUJET

A-t-elle pensé à ses arrière-petits-enfants qui feuilletteraient un jour l'album où son portrait figurerait dans un cadre cerné d'or ? S'est-elle demandé ce qu'ils penseraient d'elle, la mère, la doyenne de la famille ? Elle était sûre qu'elle ferait bonne figure, et que ses descendants ne laisseraient pas de l'admirer : droite, digne, avenante, avec un soupçon de condescendance, riche de ses ornements, de sa toilette d'apparat.

Elle ne savait pas comment aurait-elle osé l'imaginer ? que sa famille à venir la vendrait avec l'album doré sur tranche, et qu'elle échouerait chez un marchand de bric-à-brac parmi les vieilles lampes et les vases dépareillés.

C'est pourtant là que nous l'avons découverte, un jour que nous chinions sans enthousiasme au marché aux puces. [...] Les coins de l'album étaient à peine râpés, la page de garde revêtue de moire écarlate, le fermoir d'argent tenait bien, l'or des tranches était sans défauts. Sur la couverture de cuir, un monogramme figurait un M et un O entrelacés et tarabiscotés.

Et toute la famille se tenait là, comme à la parade. Parfois, d'une écriture maladroite qui jurait avec la dignité de la page, était inscrit un nom, noté à la va-vite, sans respect pour les images déjà anciennes : Annie Anorée, Valentine, Clotilde, Mon oncle Augustin de Sainte-Opportune, Famille du Coudray, Arthus, Henri, Suzanne... Mais, pour la dame qui occupait la première page : il n'y avait rien.

Comment s'appelait-elle, cette femme vieillissante et superbe ? Etait-elle une bourgeoise riche qui menait la vie dure à ses domestiques et régentait sa maison d'une main de fer, ou une personne issue de la noblesse provinciale ?

Elle s'appelait Césarine peut-être, ou bien Julie, ou bien Honorine. J'aimerais savoir où elle vivait, quel paysage elle contemplait quand elle se tenait droite devant sa coiffeuse et que sa femme de chambre brossait ses longs cheveux avant de les relever en couronne au-dessus de son front.


Suzanne PROU, L'Album de famille, Grasset, 1994.


I - LE PORTRAIT


1) Qui est désigné par le pronom "elle" dans le texte ?
Relevez, dans le passage allant du début à "... d'apparat", un groupe nominal désignant ce personnage. (Grammaire)

2) A quel endroit du texte le narrateur intervient-il dans son récit ?
Quel est son rôle dans l'histoire ? (Compréhension)

3) Relevez trois mots ou expressions appartenant au champ lexical de la parenté.
Par quel autre mot du même champ lexical pourrait-on désigner la femme du portrait ? (Vocabulaire)

4) Sur quels indices le narrateur s'appuie-t-il pour supposer que cette femme appartient à un milieu social favorisé, riche bourgeoisie ou noblesse provinciale ? (Compréhension)


II - LE TEMPS QUI PASSE


1) Placez sur un axe des temps dans l'ordre chronologique les verbes :
"elle ne savait pas", "vendrait", "nous l'avons découverte", "j'aimerais savoir". (Grammaire)

2) Réécrivez la phrase "Elle était sûre qu'elle ferait bonne figure" en mettant le verbe de la proposition principale au présent de l'indicatif.
Déduisez-en la valeur de la forme "ferait". (Grammaire)

3) a) Expliquez le sens de "bric-à-brac", "vases dépareillés".

b) Relevez dans le texte une expression recoupant le sens de "marchand de bric-à-brac". (Vocabulaire)

4) "la vendrait", "elle échouerait"
Que représentent les pronoms en gras ?

Qu'est-ce qui en réalité a été vendu et a échoué chez le marchand ?
Quelle idée le narrateur exprime-t-il par cette ambiguïté ? (Grammaire et compréhension)


III - LE MYSTERE


1) Pourquoi les phrases interrogatives sont-elles si nombreuses dans le texte ? (Compréhension)

2) Relevez dans le passage allant de "comment s'appelait-elle" à "où elle vivait" quatre termes qui expriment l'incertitude du narrateur. (Vocabulaire)

3) "J'aimerais savoir où elle vivait" : indiquez la nature et la fonction de la proposition "où elle vivait". (Grammaire)

4) Dressez l'inventaire des questions qui restent sans réponse

a) pour le narrateur
b) pour le lecteur (Compréhension)

LE CORRIGÉ

I - LE PORTRAIT


1) Le pronom "elle" représente la dame dont le portrait se trouve dans l'album de famille acheté aux puces.
Le groupe nominal qui désigne ce personnage est "la mère, la doyenne de la famille".

2) Le narrateur intervient dans le récit au troisième paragraphe, quand il évoque l'acquisition de l'album au marché aux puces : "nous l'avons découverte".
Suzanne Prou a acheté l'album, elle le regarde, ce qui provoque en elle une longue réflexion sur le temps passé et l'oubli.

3) Voici des mots ou expressions du texte appartenant au champ lexical de la parenté :

"arrière-petits-enfants, la mère, la doyenne de la famille, descendants".
On aurait pu aussi la désigner par "l'ancêtre, la grand-mère, l'arrière-grand-mère..."

4) Pour supposer que cette femme appartient à un milieu social favorisé, riche bourgeoisie ou noblesse provinciale, le narrateur s'appuie sur les indices suivants :

"cadre cerné d'or, digne, un soupçon de condescendance, riche de ses ornements, de sa toilette d'apparat, fermoir d'argent, or des tranches, couverture de cuir, monogramme, superbe, sa femme de chambre".


II - LE TEMPS QUI PASSE


1) Classement chronologique des verbes

- elle ne savait pas
- vendrait
- nous l'avons découverte
- j'aimerais savoir

2) Réécriture de la phrase "Elle était sûre qu'elle ferait bonne figure" au présent : "Elle est sûre qu'elle fera bonne figure".
On peut en déduire la valeur de "futur dans le passé" du conditionnel "ferait", qui marque une action postérieure à celle de la principale.

3) a) Un "bric-à-brac" est un amas de vieux objets hétéroclites, destinés à la revente.
"Vases dépareillés" reprend cette idée, "dépareillé" signifiant qui n'est pas complet, qui n'est plus avec les autres objets formant une paire, une collection.

b) "Marché aux puces" recoupe le sens de "marchand de bric-à-brac".

4) Les pronoms "la" et "elle" représentent la dame. En réalité, c'est la photo qui a été vendue et qui a échoué chez le marchand.
Par cette ambiguïté, le narrateur exprime l'idée que c'est l'être qui a été vendu, abandonné par sa famille, et non l'objet.


III - LE MYSTERE


1) Les phrases interrogatives sont aussi nombreuses parce que le narrateur cherche à retrouver l'origine, l'identité, de la mystérieuse dame du portrait.

2) Termes qui expriment l'incertitude du narrateur : "comment, ou, peut-être, ou bien, ou bien, où".

3) "où elle vivait" est une proposition subordonnée interrogative indirecte. Elle est COD du verbe savoir.

4) Questions qui restent sans réponse pour le narrateur :

- l'identité, l'origine de la dame du portrait
- son nom, son prénom, son âge
- son cadre de vie

Pour le lecteur, ce sont les mêmes interrogations auxquelles s'ajoutent des questions sur ce que pouvait éprouver cette femme, l'aspect psychologique du personnage.

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