Le sujet 2006 - Bac ES - Sciences Economiques et Sociales - Question de synthèse |
Avis du professeur :
Le sujet porte sur la place des syndicats dans les
mobilisations sociales. |
THEME DU PROGRAMME :
Conflits et mobilisation sociale
I - TRAVAIL PREPARATOIRE (10 points)
Vous répondrez à chacune des questions en une dizaine de lignes maximum.
1. Montrez que la baisse du taux de syndicalisation résulte en partie de transformations socioéconomiques. (document 1) (2 points)
2. L'institutionnalisation des syndicats n'a t-elle que des effets négatifs ? (document 1) (1 point)
3. Quels facteurs influencent le taux de syndicalisation ? (document 2) (2 points)
4. Exposez les transformations significatives que ce
graphique met en évidence.
(document 3) (2 points)
5. En quoi le conseil des prud'hommes illustre-t-il un des rôles actuels des syndicats ? (document 3) (1 point)
6. Montrez que le champ d'action des syndicats ne se limite pas à la gestion des conflits. (document 4) (2 points)
II - QUESTION DE SYNTHESE (10 points)
Après avoir expliqué les évolutions du syndicalisme, vous montrerez que les syndicats restent des acteurs importants de l'action collective.
Document 1
La France n'a jamais eu de syndicalisme fondé sur des adhérents nombreux,
sauf à certaines époques exceptionnelles et dans des professions particulières.
Déjà faibles, les taux de syndicalisation ont connu cependant, depuis le milieu
des années soixante-dix, une chute rapide.
Les grands secteurs industriels, bastions des syndicats et particulièrement de la CGT, ont connu de fortes diminutions d'emplois, au profit d'activités commerciales et de
services souvent peu syndiquées. Les ouvriers sont moins nombreux, et ils sont
remplacés par des employés ou par des cadres.
Les salariés sont devenus plus "utilitaristes" que par le passé
vis-à-vis des syndicats : ils y font appel en cas de besoin, sans s'y sentir
engagés.
[Autre] cause de déclin, l'effacement du syndicalisme de proximité au profit
d'un syndicalisme "institutionnalisé". Progressivement, les militants
syndicaux sont aspirés par de nouvelles tâches. En effet, les syndicats
s'impliquent plus dans la gestion paritaire (Assedic, caisses de sécurité
sociale). Des négociations d'entreprise se développent, obligeant les militants
à se professionnaliser. Dans certaines entreprises, seuls les élus sont encore
syndiqués, et il ne leur est plus possible de mener une action au quotidien,
faute de relais à la base.
Source : Michel Cezard, Jean-Louis Dayan, Les Relations Professionnelles en
Mutation,
Données sociales, INSEE 1999.
Document 2
Syndicalisation et présence syndicale selon l'employeur, la taille de l'établissement
et les conditions d'emploi en France en 2003
EN % DES SALARIÉS |
Taux de syndicalisation |
Présence syndicale sur le lieu de travail |
État, collectivités locales, hôpitaux publics |
15,1 |
52,7 |
Entreprises publiques, Sécurité sociale |
15,6 |
70,7 |
Entreprises privées |
5,2 |
31,2 |
Etablissements de moins de 50 salariés |
3,5 |
8.3 |
Établissements de 500 salariés et plus |
8,7 |
81,2 |
Salariés en contrat à durée déterminée ou en intérim |
2,4 |
23,2 |
Salariés en contrat à durée indéterminée à temps complet |
9,5 |
42,5 |
Ensemble des salariés |
8,2 |
38,5 |
Lecture : en 2003, 52,7 % des salariés de l'Etat, des
collectivités locales ou des hôpitaux publics déclarent qu'un syndicat est
présent sur leur lieu de travail.
Source : DARES, Première Synthèses, n°44, octobre 2004.
Document 3
Résultat des élections prud'homales en % (collège des salariés)
Le conseil des prud'hommes traite des litiges individuels entre employeurs et salariés, les conseils prud'homaux qui jugent ces litiges sont constitués à parité de représentants élus des organisations syndicales et patronales
CGT : Confédération générale du travail
CFDT : Confédération française démocratique du travail
FO : Force ouvrière
CFTC : Confédération française des travailleurs chrétiens
CGC : Confédération générale des cadres
Source : D. Andolfatto (sous la direction de), Les Syndicats en France,
La Documentation française, 2004.
Document 4
Impliqué dans la cogestion des entreprises, le syndicalisme allemand est
puissant et, à la différence de la plupart des syndicats européens, a connu une
faible désyndicalisation au cours de la dernière période. Près de 40% des
salariés sont impliqués et les syndicats allemands regroupent en 1993 environ
13 millions d'adhérents. La cogestion est une pierre angulaire du système social.
Elle concerne les entreprises de plus de 500 salariés. Salariés et
organisations syndicales sont représentés, avec voix délibérative, au sein du
conseil de surveillance des entreprises. Ce dernier se prononce sur les grandes
orientations et désigne le directoire qui assure la conduite effective de
l'entreprise [...].
Avec plus de 80% d'adhérents, le taux de syndicalisation en Suède est un des
plus élevés du monde. Le syndicalisme, outre ses fonctions revendicatives de
base, la défense des intérêts professionnels des salariés, assume la gestion des
caisses de chômage en lieu et place de l'Etat.
Source : H. Landier, D. Labbe, Les Organisations Syndicales en France,
Editions Liaisons, 2004.
I - L'ANALYSE ET LES DIFFICULTES DU SUJET
Le sujet porte sur les points du programme suivants :
"Mutation du travail et conflits sociaux" et "La diversification
des objets et des formes de l'action collective". Le sujet -assez
classique- est d'autant plus intéressant que la période récente en France a été
marquée par des conflits sociaux importants.
Vous devez réfléchir sur la place des syndicats dans l'action collective, en n'oubliant pas que les conflits
du travail ne sont pas régulés seulement par les syndicats.
Les documents couvrent bien l'évolution du syndicalisme en France. Leur lecture
attentive vous permet
de bien traiter le travail préparatoire.
Vous devez ajouter des connaissances personnelles, notamment sur l'évolution
des conflits du travail. Evitez de dévier du sujet en évoquant les actions
collectives qui sont en-dehors du monde du travail.
II - LES OUTILS : SAVOIRS ET SAVOIR-FAIRE
Vous pouvez mobiliser les points suivants :
● L'actualité des conflits du travail, évolution
du nombre de jours de grève (les JINT)
● Les mouvements collectifs récents : le CPE, la réforme des retraites en 2003, l'opposition aux délocalisations
● La crise industrielle depuis les années 70
● La montée du chômage et de la précarité
● Les politiques visant à affaiblir le syndicalisme aux Etats-Unis ou en
Grande Bretagne notamment.
● La place des syndicats dans la gestion
paritaire des caisses de protection sociale
● Le développement de l'individualisme chez les salariés
● La tertiairisation des activités et de la main d'oeuvre
● Evolution du taux de syndicalisation depuis les années soixante.
III - ELEMENTS DE REPONSE AU TRAVAIL PREPARATOIRE
1. Plusieurs transformations ont conduit à
l'affaiblissement du syndicalisme depuis les années 70 :
● disparition (ou déclin) des grands
centres industriels qui concentraient la main
d'oeuvre ouvrière, fortement syndiquée
● essor d'activités tertiaires
avec une faible syndicalisation
● déclin du militantisme syndical chez les
salariés, sans doute devenus plus pragmatiques et consommateurs d'une
prestation individualisée
● professionnalisation des militants
syndicaux, plus souvent déconnectés des problèmes
du terrain
2. L'institutionnalisation du syndicalisme a favorisé
sa reconnaissance sociale et son importance dans la gestion des conflits. En
agissant au sein des structures de la protection sociale et de la
réglementation du monde du travail, les syndicats ont pu obtenir un certain
nombre de droits favorables aux salariés.
Ceci a cependant contribué à les éloigner de leur base, c'est-à-dire des
problèmes du terrain.
3. Les chiffres du document 2 font bien apparaître
les critères qui influencent la syndicalisation :
● le statut (public ou privé) de l'employeur
● la taille de l'établissement, en nombre de salariés
● le type de contrat de travail du salarié
4. Les évolutions
significatives entre 1979 et 2002 :
● très forte augmentation du taux d'abstention aux élections prud'homales
● déclin des résultats de la CGT, syndicat réputé plus radical, qui reste cependant majoritaire
● légère progression de la ligne "autres", maintien de la CGC et de la CFTC, confirmant un certain émiettement du syndicalisme
5. En étant présents dans les conseils des prud'hommes, les syndicats interviennent dans les problèmes de gestion individuelle de main d'oeuvre. Il s'agit de régler des litiges qui existent entre un salarié et son employeur. Ceci montre le maintien d'une fonction de "proximité" dans l'action syndicale, qui ne s'inscrit donc pas seulement dans des grandes instances nationales (caisses de protection sociale par exemple).
6. Les syndicats interviennent dans
les conflits du travail bien sûr, mais ils sont parfois associés à la gestion :
● de l'entreprise (co-gestion allemande)
● des indemnités de chômage (Suède)
● de la Sécurité Sociale en France (maladie, vieillesse, chômage)
● des recrutements (closed shop aux Etats-Unis et en Grande Bretagne)
IV - UN PLAN POSSIBLE A LA QUESTION DE SYNTHESE
Introduction
Les événements sociaux dans la période récente en France ont
illustré les tensions qui traversent la société et
plus précisément le monde du travail. La réforme
Fillon des retraites en 2003 ou encore le projet de mise en place d'un Contrat
Première Embauche en mars 2006 ont provoqué des manifestations de grande
ampleur.
Même si, sur le long terme, on constate une diminution des grèves et des taux
de syndicalisation, les inquiétudes (liées au chômage par exemple) nourrissent
depuis quelques années des mobilisations collectives et posent la question de
la place des syndicats de salariés dans la société.
Partie 1 : Des transformations économiques et sociales ont provoqué un déclin qualitatif du syndicalisme depuis les années 70.
A. Les difficultés économiques ont réduit la population
"syndicalisable"
● Impact de la crise
industrielle sur les grandes concentrations ouvrières (mines,
sidérurgie, chantiers navals, automobile)
● Montée du chômage et de la précarité
● Essor des activités de services moins syndicalisées
B. Il y a une crise de l'engagement militant chez les
salariés
● Crainte du chômage et repli de la
contestation
● Discours syndical mal adapté à des
salariés dotés d'une conscience politique moins forte
● Développement de comportements et de
stratégies plus individualistes
● Essor des pratiques d'individualisation
dans la gestion des ressources humaines.
Partie 2 : Même si leur place a changé, les syndicats restent des acteurs importants dans le monde du travail
A. Le déclin du syndicalisme peut
être relativisé
● Les taux de syndicalisation sont restés importants dans
certains pays (Allemagne, Suède)
● En France, le déclin syndical n'est pas uniforme (cf. document 2)
● Regain de popularité récent, à la faveur
des grandes causes nationales (retraites, CPE,...)
B. L'action syndicale s'est déplacée au-delà de
l'entreprise
● Présence syndicale dans les conseils des prud'hommes
● Action syndicale dans la gestion paritaire des instances de protection sociale
(Sécurité Sociale en France par exemple)
● Ils participent aux
négociations nationales sur les grands sujets (35 heures, CPE,
formation...)
Conclusion
Avec aujourd'hui moins de 9% de syndiqués, la France donne un exemple de société où les contre-pouvoirs sont faibles,
face aux instances de décision économiques (les entreprises) ou politiques
(l'Etat).
Les enjeux sont pourtant essentiels, notamment dans le monde du travail :
chômage, flexibilité, mondialisation, protection sociale...
Au-delà du syndicalisme, c'est sans doute le fonctionnement de notre démocratie
qui est mis à l'épreuve.
V - LES "PLUS"
● les congrès récents
des grands syndicats en France : CGT et CFDT
● des repères sur l'histoire
du mouvement syndical en France, par exemple le droit de grève autorisé
en 1864, les syndicats autorisés en 1884, la section syndicale d'entreprise en
1968
● le syndicalisme dans d'autres pays : les
Etats-Unis et la Grande Bretagne
● les pratiques de l'individualisme
dans la gestion des ressources humaines au sein des entreprises
● les mouvements étudiants visant à une
réglementation des stages en entreprise
● les mouvements des chômeurs
et précaires
● le militantisme pour une Europe sociale
● le paradoxe d'OLSON : le passager
clandestin