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Annales gratuites Bac L : Diderot : Les tahitiennes

Le sujet  2003 - Bac L - Littérature - Question Imprimer le sujet
LE SUJET

Vous vous interrogerez sur le statut des femmes tahitiennes tel que Diderot l'évoque dans le Supplément au voyage de Bougainville.

LE CORRIGÉ

I- L'ANALYSE DU SUJET

La question posée conduit à s'interroger sur le statut des femmes dans l'Otaïti rêvé par Diderot à partir du récit de Bougainville.
Il convient d'en analyser les privilèges mais aussi les limites, qui apparaissent à travers les observations et les dialogues des différents personnages du texte.
Ce statut est défini par les lois de l'île et consiste dans la situation de fait qui est réservée aux femmes.

II - LES REACTIONS A CHAUD DU PROFESSEUR

Ce sujet ne devait pas décontenancer les candidats car le statut des femmes tahitiennes constitue un aspect essentiel du texte de Diderot, centré sur les coutumes et les lois civiles et religieuses régissant la sexualité.

III - LE TRAITEMENT DU SUJET

Même si toutes les instances des différents dialogues du Supplément au Voyage de Bougainville de Diderot sont masculines, à l'exception d'une américaine, Miss Polly Baker, le question du statut des femmes tahitiennes y apparaît comme essentielle.
A première lecture, il semble privilégié par rapport à celui des européennes, mais à l'analyse, on peut déceler bien des limites, des restrictions et des contraintes, dans la condition féminine à Tahiti.

Les femmes d'Otaïti apparaissent tout d'abord comme des filles heureuses, entourées de l'affection de leurs parents. C'est l'image donnée par les trois filles d'Orou, Asto, Palli et Thia, au début de son entretien avec l'aumônier.
Le texte insiste également sur leur épanouissement sexuel et leur liberté de choix : selon Orou, chaque jeune fille peut "se promener publiquement le visage découvert et la gorge nue, accepter ou refuser les caresses d'un homme."
Au cours d'une fête "on déploie l'homme nu devant elle sous toutes les faces et dans toutes les attitudes". Elle fait son choix et reste avec l'homme qu'elle a élu "tant qu'elle s'y plaît". Elle est libre de le quitter ensuite quand elle le désire.
La tahitienne est enfin une mère comblée. L'annonce de sa grossesse enchante sa famille, la naissance de ses enfants donne lieu à une fête de toute la société de l'île.

Si le Supplément au Voyage de Bougainville privilégie ainsi les femmes, c'est essentiellement parce qu'il peut se lire comme une apologie de la procréation.
Ainsi les critères de séduction qui rendent esclaves les européennes, être belles, suivre la mode, n'existent pas à Tahiti. Peu importe la beauté des femmes, si elles sont en bonne santé et capables de faire des enfants nombreux et bien portants.
De même, tous les tabous sociaux et religieux qui caractérisent l'Europe dans le domaine de la sexualité, n'existent pas à Tahiti. Une fille peut être mère sans se marier, avoir plusieurs compagnons. Les enfants constituent sa richesse et sa dot.
A plusieurs reprises, Orou revient sur cette liberté et la fête et le bonheur qu'elle engendre.
Hymne à la reproduction, le discours d'Orou révèle, par là même, les limites de l'émancipation des femmes et permet d'analyser les contraintes qui leur sont imposées.

Tout d'abord on peut noter que le rôle des filles sur l'île reste celui qui est traditionnellement réservé à la femme.
Elles ne semblent pas participer aux lois et aux décisions qui règlent la vie de l'île. Les filles d'Orou, au chapitre 3, se chargent des soins de la toilette de l'aumônier et lui servent "un repas sain et frugal".
La vie sexuelle est entièrement soumise à la nécessité de procréer. Des voiles de différentes couleurs, blancs pour les filles impubères, gris pour celles qui ont leurs règles, noirs pour les femmes stériles, les désignent à l'ensemble de la société. La sexualité leur est alors momentanément ou définitivement interdite. Des punitions sévères frappent celles qui enfreignent les règles. La jeune fille d'Orou, Thia, se plaint des reproches de ses parents et des moqueries de ses sœurs parce qu'elle n'a pas encore d'enfants.
Enfin l'amour et les sentiments ne sont pas véritablement évoqués dans le texte. L'acte sexuel est un plaisir, simple "frottement des intestins", dont l'aboutissement nécessaire doit être d'engendrer.
Tahiti apparaît comme une société eugéniste, gouvernée par l'intérêt démographique bien plus que par l'épanouissement des êtres. La femme est par ailleurs totalement soumise au pouvoir masculin. Son père lui désigne les garçons qu'elle pourra choisir, l'offre à ses hôtes, la conduit aux hommes de Bougainville.

Ainsi le statut des femmes tahitiennes peut sembler privilégié dans la "fable" de Diderot. A l'analyse, elles y figurent cependant essentiellement comme reproductrices et non comme individus à part entière.

IV - LES ERREURS A EVITER

- Idéaliser le sort des tahitiennes.
- Penser que Diderot adhère absolument aux propos d'Orou.
- Décrire et raconter plutôt qu'argumenter.

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