Pour bien réussir une épreuve d'examen, il est nécessaire de réfléchir à ce que l'on attend de vous. C'est ce que je vous propose ici, en vous donnant des conseils pour la dissertation de philosophie.
A) La nature a horreur du vide
Les correcteurs se plaignent souvent de l'absence de réflexion dans les copies. Il va de soi que quatre heures sont insuffisantes pour élaborer (pour vous comme pour nous) une réflexion de haut vol. Mais elles suffisent à élaborer une réflexion digne de ce nom. Qu'est-ce que cela veut dire ? Une dissertation, on vous l'a suffisamment répété, doit
progresser.
Comment faire ?
Lorsque vous élaborez votre plan au brouillon, il est fondamental de noter en rouge les apports de chacune de vos parties.
Voici une liste de questions à vous poser pour vérifier la pertinence de vos parties (donc de votre progression) : quel est l'intérêt de cette référence ? de cet exemple ? apportent-ils un élément à ma réflexion ? Si vous ne parvenez pas à répondre : oubliez-les.
Conseil : prenez des corrigés de dissertation et formulez précisément les apports de la partie en répondant aux questions données en exemple. Lorsque vous aurez répondu à ces questions, vous aurez légitimé la démarche argumentative adoptée.
B) Réciter n'est pas jouer
Il est certain que l'on attend de vous des connaissances (ne serait-ce que pour prouver que vous avez suivis une année de philosophie...). Mais vous devez bien comprendre comment convoquer les philosophes dans votre copie.
Pourquoi convoquer des auteurs ?
Si l'on a tous des idées (plus ou moins brillantes), il faut savoir être humble. On doit pouvoir reconnaître qu'Aristote ou Spinoza ont dit des choses intéressantes, quel que soit le nombre de siècles qui nous sépare d'eux. Il faut donc montrer que les philosophes nous aident à penser.
Comment faire ?
Dans votre cours de philosophie, vous étudiez des notions à travers des auteurs. Chez vous, vous devez être capables de faire un schéma de la progression de votre cours. Par exemple, une leçon sur la Liberté abordera différentes conceptions de la liberté et étudiera progressivement les difficultés que cette notion peut poser. Vous devez répertorier ces difficultés, y associer un auteur et un texte. Vous élaborez ainsi une liste de difficultés et de références. Ce travail personnel est le seul qui vaille véritablement. Pourquoi ? Parce qu'en synthétisant ce chemin de réflexion, vous construisez le schéma d'une pensée philosophique en acte. Vous apprenez à disserter.
Ecueil
Cela ne signifie pas que vous devez répertorier les différentes conceptions des philosophes. Dire que "x pense ça contrairement à y qui dit que" n'est pas penser. C'est montrer que vous avez des connaissances. Certes, c'est louable, mais ce n'est pas philosopher.
Vous devez donc réprimer fortement le désir d'"étaler" (le mot est lancé !) votre savoir, et ceci encore plus le jour de l'épreuve où la tentation est grande.
C) Sapere aude ! (Aie le courage de te servir de ton propre entendement !)
Ici nous abordons le point le plus difficile. Qu'apprécie un correcteur ? Un candidat qui l'invite à réfléchir.
Ecueils
Devant un sujet de dissertation, trois réactions sont possibles :
1. "Ca m'inspire pas."
2. "Super, c'est le cours sur ... !"
3. "Facile, ça ressemble au sujet de dissert qu'on a fait !"
Elles correspondent à trois erreurs :
1. vous n'avez pas besoin de Muses
2. un sujet de dissertation n'invite pas à la récitation d'un cours
3. un sujet est toujours original
Illustrations
Soit un sujet du Bac 2005 : "Qu attendons-nous de la technique ?"
Réaction 2 : "Super, c'est le cours Travail et Technique !"
Catastrophes annoncées : une récitation du cours, un hors sujet attendu puisqu inévitablement la copie va parler du travail (terme n'apparaissant pas dans le sujet...)
Réaction 3 : "Facile, ça ressemble à ma dissert Qu'est-ce que la technique ? "
Catastrophe annoncée : la copie va traiter une autre question
Que faire ?
1. Prendre au sérieux le sujet.
Vous ne pouvez imaginer combien de copies considèrent que la question va de soi. Mais alors... pourquoi la pose-t-on ?
2. Il faut penser en amont du sujet : pourquoi la question se pose-t-elle ?
ex : Ici la question se pose car la technique occupe une place très importante dans notre société contemporaine (nous possédons tous des objets techniques très perfectionnés) ; est-ce un bien ? est-ce un mal ? (songez aux débats autour de l'Internet qui favoriserait l'isolement et le rétrécissement des liens).
Il y a donc bien débats autour de la technique. Le sujet y fait référence implicitement. Mais il nous oriente en nous posant une question fondamentale, essentielle (qui est peut-être sous-jacente aux débats mentionnés) : quelles espérances, quelles attentes forge-t-on autour de la technique ? Autrement dit : quelle est la valeur de la technique ?
On le voit, la perspective est dans une certaine mesure normative. A partir de là différentes voies surgissaient. Augmentation du bien-être ? Perfectionnement moral ? Perfectionnement social ? Egarement ontologique ? Aliénation ?
3. Il faut peser tous les termes de l'énoncé
relever l'idée d'attente (le verbe) ; faire attention au pronom ("nous") : de qui parle-t-on ? ce pluriel est-il légitime ? Tout le monde a-t-il les mêmes attentes ? on comprend alors que le nous désigne alors peut-être l'humanité : faire attention à la notion : la technique (à distinguer de l'art et, si le cours l'a envisagée parallèlement au travail, bien la dissocier).
En bref, réussir une dissertation, c'est :
1. prendre un sujet au sérieux
2. penser et non réciter
3. répondre à la question et non faire diversion
Ce sont les 3 attentes de tous les correcteurs.
Impliquez-vous ! Ne laissez pas penser aux correcteurs que réfléchir vous ennuie...
